12/04/19

Certificats d’économies d’énergie (CEE), un dispositif vertueux mais onéreux

Selon le Ministère de la Transition écologique et solidaire, le dispositif des CEE aurait permis d’économiser depuis son lancement en 2006 l’équivalent de la consommation énergétique de 17 millions de Français pendant 15 ans.

Le principe est certes vertueux, mais l’addition est lourde. Le coût du dispositif est estimé actuellement à environ 100 euros par ménage. Et ce sont les 28 millions de ménages qui le financent, qu’ils aient ou non profité du dispositif en réalisant des travaux d’efficacité énergétique.

Le dispositif de CEE fonctionne par triennale et 2018 marque le début de la 4ième période. Les objectifs de cette période, très ambitieux, ont doublé par rapport à la période précédente.

Le bilan 2018 est mitigé : certes la production a augmenté par rapport à 2017 mais elle atteint seulement en fin d’année 60% de l’obligation annuelle.

L’offre ne couvrant pas la demande, cette course aux CEE a engendré une forte hausse des prix. Sur les gros chantiers, les clients et les entreprises réalisant les travaux font jouer la concurrence pour obtenir les meilleurs prix, et sur les marchés, le cours du CEE s’envole : en 2 ans, le prix du MWhc[1] a été multiplié par 3, passant sur le marché EMMY de 2,1€ à 6,7€ entre février 2017 et février 2019.

Et cette hausse pourrait continuer et tendre vers la valeur de la pénalité, fixée par l’Etat à 15€/MWhc : Autrement dit, si à l’issue de la période, le fournisseur d’énergie n’a pas atteint ses obligations, il devra 15€ pour chaque MWhc manquant. L’obligation de la 4ème période étant colossale (1 600 TWhc[2]), l’addition pourrait s’avérer extrêmement élevée pour les fournisseurs qui n’atteindront pas leurs objectifs.

Le coût de ce dispositif, en pleine surchauffe, est répercuté sur le prix de l’énergie: mi 2019, les 25 millions de foyers au tarif réglementé verront leur facture augmenter de 6% environ, soit 85 euros par an en moyenne pour un foyer qui se chauffe à l’électricité.

[1] Mégawatt-heures cumac (MWhc) : unité de mesure des certificats d’économies d’énergie

[2] Terawatt-heure cumac (TWhc) : 1 TWhc = 1 000 000 MWhc

Différentes mesures ont déjà été lancées depuis le début de l’année, ou sont à l’étude, pour tenter d’adoucir l’impact du dispositif sur les ménages. L’Etat propose ainsi aux particuliers une bonification de certaines opérations pour mieux isoler ou chauffer leur logement. Cette bonification est ouverte à tous et son montant est calculé en fonction des ressources du ménage.

Pour accroitre la notoriété des CEE, et donc augmenter le volume de l’offre, les fournisseurs d’énergie marketent de plus en plus le dispositif : multiplication des offres à 1€, campagnes d’emailing envoyées aux bénéficiaires (entreprises et particuliers), refonte des interfaces digitales, communication sur les réseaux sociaux, simulateurs de prime CEE en ligne… Les CEE ne sont plus l’affaire de spécialistes : toutes les entités, particuliers, entreprises et collectivités, peuvent en bénéficier.

Comme pour chaque triennale, le périmètre des fiches éligibles (recensant les travaux d’efficacité énergétique pouvant faire l’objet d’une prime CEE) va également être revu en cours de période par des arrêtés ministériels, ce qui pourrait également augmenter le potentiel.

Le ministère de la Transition écologique a récemment retenu six nouveaux programmes dans le cadre du dispositif des CEE, clôturant ainsi l’appel à programmes CEE pour la période 2018-2020. Celle-ci compte désormais 34 programmes lauréats ayant pour but de promouvoir l’efficacité énergétique.

Les six derniers programmes retenus portent sur 4 axes : la formation des acteurs du secteur bancaire aux enjeux de la rénovation énergétique, la formation des petites et moyennes entreprises à la réduction de leur consommation d’énergie, la massification de la rénovation énergétique et le transport.

Enfin, la 4ième période pourrait être prolongée d’un an. Les modalités restent à préciser, notamment sur le niveau supplémentaire de CEE à produire. Cette décision sera vraisemblablement prise courant / fin 2019, au regard des résultats.

Il y a donc fort à parier que les volumes de CEE récoltés en 2019 et 2020 seront supérieurs aux résultats enregistrés en 2018. Le dispositif de CEE est aujourd’hui critiqué en raison de son coût et de son efficacité. Tous les acteurs s’accordent néanmoins pour dire qu’il représente un réel levier de financement pour la massification des travaux de rénovation énergétique.

Virginie CAMBOURNAC