04/09/17

Qui prendra les commandes de l’auto-partage ?

L’innovation bat son plein dans l’auto-partage, confirmant le développement d’une industrie du service et du partage là où la propriété individuelle du véhicule prévaut depuis plus d’un siècle.
Dans ce contexte, l’industrie du transport multiplie les investissements pour répondre à de nouveaux usages, faire face à ses concurrents directs et contrer les géants du web.

Les premières initiatives d’auto-partage en France dans les années 2000 étaient l’œuvre de quelques start-up (Zipcar, Mobizen, Communauto) soutenues par des agglomérations soucieuses de développement durable, telles que Paris ou Strasbourg.

Depuis quelques mois, le phénomène prend une autre dimension avec l’irruption de grands groupes industriels (PSA, Renault, Bosch, Avis, Europcar, Alphabet) qui investissent des montants importants pour industrialiser l’auto-partage, y trouver une rentabilité et maîtriser les ressorts de la demande clients.

Il est vrai que le spectre du véhicule autonome va transformer le rapport de l’homme à l’automobile. En outre, pourquoi produire un véhicule qui restera sur une place de stationnement 90% du temps si on peut le partager facilement avec un smartphone ? Pourquoi payer pour la détention permanente d’une voiture quand on peut ne payer que son utilisation ?

Poussé par la vague du développement durable, l’auto-partage se développe avec l’assentiment des pouvoirs publics qui considèrent par la voix de l’ADEME (Agence De l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie) que chaque voiture en auto-partage remplace 10 voitures personnelles et libère 9 places de stationnement.

Parmi les lancements de projets en 2017, les industriels de l’automobile prennent une place significative.

Carlos Tavarez, PDG de PSA, a annoncé la couleur il y a un an. Son plan « Push To Pass » vise à faire entrer PSA dans une nouvelle ère : celle de la data, de la relation client et des services numériques. PSA a lancé en juin 2017 son application Free2Move qui agrège les disponibilités et compare le coût des véhicules des principaux opérateurs d’auto-partage et de co-voiturage à Paris : Autolib’, Communauto, Drivy, Koolicar, Travelcar et Zipcar. Avec cette offre, PSA se positionne sur le marché de la réservation de véhicules alors que son service d’auto-partage B2B Free2Move Fleet Sharing vient d’être lancé.

 

Les industriels de l’automobile en première ligne face aux géants du web

Tous les grands industriels de l’automobile sont mobilisés, qu’il s’agisse de BMW qui étend sa flotte à 550 véhicules électrifiés à Hambourg via Drivenow, ou l’alliance Renault-Nissan qui prend la parole par la voix d’Ogi Redzic, chef de sa division véhicules connectés et services de mobilité : « nous voyons l’avenir dans l’automatisation, les véhicules électriques, l’auto-partage et les services de réservation ».

Si la concurrence fait rage entre acteurs de l’automobile, ne nous y trompons pas, l’enjeu consiste à garder la main face aux géants du web qui pénètrent depuis plusieurs années le marché de l’automobile, qu’il s’agisse d’Alphabet dans le domaine du véhicule autonome et connecté ou d’Uber dans le paiement à l’usage.

Les acteurs de la filière électrique ne sont pas en reste. Après EDF qui a développé avec Transdev le réseau Autobleue de 200 véhicules électriques dans l’agglomération niçoise, Schneider Electric vient d’annoncer le déploiement d’un service d’auto-partage sur Grenoble.

 

Les acteurs de la filière électrique suivent le filon

En étendant l’auto-partage aux véhicules deux-roues, BOSCH a décidé de déployer 600 scooters à Paris durant l’été 2017. Il entend concurrencer Cityscoot unique opérateur du marché parisien disposant d’un parc de 1000 scooters en free-floating, scooters pouvant être pris puis déposés à n’importe quel endroit de Paris. Avec sa tarification au forfait, le service de Bosch favorise les locations supérieures à 30 minutes, là où Cityscoot favorise les courses plus courtes avec sa tarification à la minute.

L’auto-partage est incontestablement un substitut à la détention d’un véhicule dans les grandes agglomérations où la demande potentielle est suffisante. Cette concentration géographique ne laisse pas insensible les transports publics qui sont à la recherche de solutions en multi-modalité pour leurs usagers.

 

Même les transports publics s’en mêlent …

En 2015, la RATP a lancé Capital Innovation, filiale dotée d’un fond de 15M€ pour investir dans les nouvelles mobilités. Avec l’objectif affiché de renforcer son offre multi-modale et sa compétitivité en réponse aux appels d’offres des collectivités, la RATP vient successivement d’investir entre mai et juillet 2017 dans deux services d’autopartage :

  • D’une part Communauto, service d’auto-partage « en boucle » où le véhicule est récupéré et déposé à la même place avec une réservation préalable possible plusieurs heures à l’avance. Communauto est leader en Amérique du Nord, s’est implanté en 2012 en France suite au rachat de Mobizen et dispose de 130 véhicules sur la voie publique parisienne
  • D’autre part Wayzup, jeune pousse spécialisée dans l’autopartage dont le modèle consiste à proposer ses services directement aux entreprises dans des zones d’activité permettant de promouvoir ses services à un grand nombre de salariés. La RATP s’est associée à Via ID, investisseur du Groupe Mobivia, pour injecter 1,4M€ dans cette start-up.

On le voit, l’autopartage a le vent en poupe et les projets venant de tous les secteurs sont légion en 2017. Cependant, dans un contexte où les investissements se font sur des cycles de long terme, avec des modèles économiques encore précaires et une faible adoption des consommateurs, la composition du marché est à peine en marche et il faudra attendre quelques années pour déterminer qui prendra les commandes du marché de l’auto-partage.