CES 2018 – Véhicule autonome : la fin du modèle de possession des véhicules au profit d’un modèle de services
Depuis plusieurs mois, VERTONE assure une veille du marché du véhicule autonome et connecté. Le décryptage de l’actualité permet au cabinet de se forger des convictions sur la manière dont ce dernier va bouleverser le secteur automobile et plus largement la mobilité.
Le véhicule autonome marquera la fin du modèle de possession des véhicules au profit d’un modèle de services
Jeudi 01 avril 2027, 8h. Résidant en limite du Grand Paris, Alexandre confie ses deux enfants à un véhicule sans chauffeur qui va les déposer à l’école. Alexandre ne possède plus de voiture depuis plusieurs années et il n’a pas l’intention d’en racheter. Comme beaucoup d’autres personnes, les services de véhicules autonomes lui simplifient la vie et lui reviennent moins cher.
Le véhicule autonome est un rêve qui devient réalité. L’accélération de la course à l’innovation que nous observons ces derniers mois et l’édition 2018 du CES de Las Vegas, dont il fut l’une des grandes vedettes, en sont les preuves.
LE VÉHICULE 100% AUTONOME ARRIVERA EN 2020, MAIS IL SERA TROP CHER POUR LE GRAND PUBLIC !
Plusieurs grands constructeurs automobiles ont dévoilé leur feuille de route. Ainsi Volvo, Lexus et Volkswagen prévoient la commercialisation de leur véhicule 100% autonome dès 2020, Ford en 2021, et Nissan en 2022. Au-delà des prouesses technologiques qui restent à accomplir, l’autonomisation des voitures sera progressive dans la mesure où elle reste conditionnée à l’assouplissement de contraintes réglementaires (propres à chaque pays) et à l’acceptation des clients. Mais elle est bien en route ! En décembre 2017, Audi a lancé sa nouvelle mouture de l’A8, en en faisant le 1er véhicule de série permettant la conduite autonome de niveau 3 (sur 5). Grâce à la fonction Audi AI Traffic Jam, l’Audi A8 peut prendre en charge la conduite dans le trafic autoroutier ralenti jusqu’à 60 km/h (embouteillages).
Il n’en demeure pas moins que le développement du véhicule autonome est complexe et que le chemin qui reste à parcourir est long. Toutes ces avancées ont un coût et auront un prix pour le client final. Pour le moment, les constructeurs restent flous sur ce sujet, à l’instar de Renault qui promet « des prix abordables » pour ses futurs véhicules autonomes. Louis DEBATTE, Strategic Marketing Manager chez TomTom Maps, estime qu’un véhicule individuel autonome sera commercialisé entre 150 000 et 200 000 euros, tandis que le français Navya proposera son AutonomCab (premier taxi autonome capable d’embarquer 6 passagers) à partir de 230 000 euros. Dans tous les cas, ces technologies seront proposées dans un premier temps sur les flagships des constructeurs haut de gamme, avant de se généraliser progressivement chez les autres constructeurs et de s’étendre à toutes les gammes de véhicules. Mais cela prendra plusieurs années avant que ces technologies ne deviennent des équipements proposés de série.
Ainsi, même en envisageant une baisse de prix du fait de la généralisation des technologies, le véhicule autonome ne sera pas dans les moyens d’une grande partie du grand public dans ses premières années…
LES SERVICES DE MOBILITÉ VONT EXPLOSER ET DÉMOCRATISER L’USAGE DU VÉHICULE AUTONOME. UNE TENDANCE QUI VA CONTRAINDRE LES CONSTRUCTEURS A SE TRANSFORMER.
Ce n’est ainsi pas sur le modèle de possession actuel que le véhicule autonome va se généraliser. La démocratisation de la technologie profitera d’abord aux acteurs des services qui transformeront la mobilité (ex : transport à la demande, autopartage…). Cela fera définitivement entrer l’automobile dans le monde du « Mobility as a Service » (MaaS).
Dans ce contexte, les constructeurs traditionnels n’auront pas d’autres choix que de s’adapter. Avec une demande très limitée des particuliers pour le véhicule autonome, ils préféreront se concentrer sur des opérateurs de flottes de voitures autonomes, de transports publics, ou encore de transporteurs. Cela va induire une transformation de leur modèle économique qui deviendra principalement B2B et qui les obligera à prendre des virages stratégiques, comme celui de se positionner sur les services ou de conserver un positionnement de constructeur pure player. Des choix stratégiques déjà bien anticipés par certains constructeurs, tels que Daimler qui a annoncé l’acquisition de Chauffeur Privé, ou Volvo qui va fournir 24 000 exemplaires de son XC 90 à Uber pour lui permettre de construire sa flotte de taxis autonomes.
Plus globalement, le véhicule 100% autonome signifiera la fin du modèle classique de possession des véhicules et accélérer le passage vers un modèle de services autour de la mobilité (et non plus seulement autour du produit seul).
UN CONTEXTE QUI VA PROFITER AUX OPÉRATEURS DES TRANSPORTS PUBLICS DONT L’OFFRE DE MOBILITÉ VA BEAUCOUP GAGNER EN ATTRACTIVITÉ AUX YEUX DU GRAND PUBLIC.
Le fait que les particuliers délaissent leurs véhicules pour recourir à des services de mobilité ne va pas seulement profiter aux gestionnaires privés de flottes de véhicules autonomes. Ce contexte fera également les affaires des opérateurs des transports publics. Grâce aux navettes collectives et aux voitures à la demande, le véhicule autonome est un moyen de résoudre la problématique du premier et du dernier kilomètre, et de renforcer le réseau de transport public avec un service disponible 24 heures sur 24.
Le grand public y trouvera son compte, car au-delà d’une meilleure couverture du réseau, l’absence de conducteurs humains, associée à des voitures plus économes en énergie, pourrait significativement réduire le coût des transports. Cela les rendra très bon marché et finira de convaincre de nombreuses personnes d’emprunter les nouveaux services de transports communs (qui seront de plus poussés par les politiques des collectivités) plutôt que d’utiliser un véhicule personnel.
Plusieurs acteurs semblent faire ce pari. Ces derniers mois, les expérimentations de navettes autonomes se sont multipliées dans le monde. Par exemple, Keolis, EasyMile et Transdev, multiplient les tests de leurs navettes en conditions réelles pour perfectionner leurs véhicules, mais aussi tester l’acceptation des clients et valider l’existence d’un besoin.
Ainsi, alors que le véhicule autonome est une des pièces du grand puzzle de la future mobilité (MaaS), la question centrale qui subsiste et à laquelle il ne semble qu’aucun acteur de l’automobile (ou des autres maillons de l’écosystème de la mobilité) n’ait vraiment répondu est celle du positionnement stratégique et marketing.
Beaucoup d’options restent ainsi ouvertes, des contours commencent à se dessiner, mais le contenu demeure flou. Suivre les actualités des acteurs du marché nous permettra de mieux comprendre ce à quoi devrait ressembler la mobilité de demain.