Assurance : un consensus inédit entre Bercy et les acteurs de la profession pour préserver le pouvoir d’achat
La rencontre le 19 septembre 2022 réunissant Bruno Le Maire et les acteurs du monde de l’assurance à Bercy a débouché sur un engagement inédit : contenir l’augmentation des primes en deçà de l’inflation. Le ministre précise cependant que le niveau de l’inflation n’est pas « un plafond chiffré au-delà duquel les assureurs ne devront pas aller », il s’agit davantage d’un consensus moral de la profession afin de prouver son engagement dans un contexte de crise. Les augmentations se feront ainsi au regard de « la réalité des risques et de la sinistralité, en particulier celle liée aux évènements naturels ».
Cette réunion fait suite au rassemblement de juin dernier pendant lequel ont été évoquées des pistes de réflexion afin de soutenir le pouvoir d’achat des Français. Parmi les mesures emblématiques prises consécutivement figuraient la simplification des démarches de résiliation en ligne, la dématérialisation de la carte verte en assurance automobile et l’augmentation des délais de rétractation en assurance affinitaire. En plus d’une recherche de simplification des démarches pour les assurés, ces mesures avaient également vocation à réduire les coûts pour les assurés avec une économie estimée de 60 millions d’euros grâce à la dématérialisation de la carte verte.
Un consensus inédit mobilisant tous les acteurs autour d’un « pack anti-inflation »
Cependant, Bruno Le Maire n’a pas abouti à un accord avec la profession aussi strict que celui convenu avec les acteurs de la banque le 13 septembre dernier, le ministre espérait en effet un plafonnement similaire à celui qui impose un seuil maximal de 2% de hausse de frais bancaires. Pas de « plafond chiffré » donc ni de « bouclier » mais des mesures prises en accord avec Bercy et présentées par la présidente de France Assureurs, Florence Lustman, sous la forme d’un « pack anti-inflation » collectif qui laisse la liberté à chaque acteur de gérer sa politique tarifaire à titre individuel tout en soutenant le pouvoir d’achat.
La profession s’est ainsi accordée autour des axes suivants :
- S’engager à contenir l’évolution des « primes moyennes de l’assurance du quotidien des Français » sous le niveau de l’inflation pour les années 2022 et 2023.
- Mettre en place un groupe de travail en collaboration avec Bercy et l’ensemble des parties prenantes sur la question des coûts de réparation à la suite d’un sinistre automobile et la mise en place d’une filière établie concernant les pièces automobiles de réemploi. L’optimisation de cette filière permettrait d’alléger considérablement les coûts de réparation en assurance auto, qui ont augmenté de 30% sur les cinq dernières années.
- S’accorder, à titre collectif, sur un effort à l’égard des sociétaires « fragiles ». Notamment, verser une remise de 100 € en une seule fois sur le contrat d’assurance auto des jeunes de moins de vingt-cinq ans à la recherche d’un emploi et étendre le contrat d’assurance santé de leurs parents en faveur des jeunes à la recherche d’un emploi.
- S’engager, à titre individuel, sur des mesures complémentaires.
Force EST DE CONSTATER QUE LES ENGAGEMENTS PRIS PAR LES ACTEURS DE LA PROFESSION VONT Généralement au-delà des efforts demandés par France Assureurs
Les acteurs travaillent sur leur offre afin d’être en cohérence avec les engagements pris à Bercy et certains décident même d’aller au-delà. Axa France, la Matmut, la Maif, Generali, la Macif, Société Générale Assurances et la Mutuelle Familiale se sont d’ores et déjà exprimés à ce sujet. Deux types de mesures se distinguent parmi celles-ci, les unes concernent l’offre en elle-même, les autres d’adressant à des publics ciblés.
Les mesures concernant l’offre se déclinent sous trois formes :
- Des efforts de tarification sur les offres existantes : ils consistent généralement en un engagement de maintien des tarifs actuels. La Matmut s’engage à ne pas faire augmenter ses tarifs en assurance scolaire pour l’année 2023, Société Générale Assurances déclare un gel de ses tarifs en prévoyance individuelle et pour la troisième année consécutive, la Mutuelle Familiale n’augmentera pas ses tarifs en contrats individuels, en santé et en prévoyance. Enfin, la Maif fixe des seuils maximaux d’augmentation sur l’ensemble de ses contrats : concernant les contrats individuels, les seuils sont fixés à +2% en assurance automobile et + 4,5% en habitation. En BtoB, ils s’élèvent à +3% en assurance auto, +4,5% pour la multirisque associations et +2% pour la multirisque entreprises.
- Des initiatives visant à soutenir davantage les clients inscrits dans une relation de long terme avec l’assureur : Generali augmente ainsi de 20% les plafonds de remboursement en assurance santé à partir de la deuxième année de contrat de chaque adhérent, Axa France offre 100€ aux clients ayant un contrat habitation et souhaitant assurer leur véhicule, la Matmut offre 100€ à ses sociétaires pour chaque souscription d’un contrat d’assurance supplémentaire et Generali offre une réduction de 100€ par an à vie à tout nouvel assuré qui souscrit conjointement un contrat automobile et un contrat habitation.
- Des nouvelles offres pour faire face au contexte : ainsi Axa va lancer une assurance inclusive qui cible « les 18 millions de Français qui vivent avec un salaire compris entre 1 000 et 1 500 euros par mois, aux dépenses serrées ». Notons que c’est un des rares cas de lancement de nouvelle offre, les autres mesures correspondent davantage à des efforts tarifaires sur les offres existantes.
Les autres initiatives ciblent des typologies de clients. Deux groupes ressortent : les populations fragiles, plus vulnérables dans le contexte actuel de hausse du niveau de l’inflation et celles ayant des comportements vertueux :
- Les adhérents fragiles se divisent en trois catégories :
- Les jeunes sociétaires : Generali propose 20% de réduction en assurance habitation pour les étudiants, la Macif gèle ses tarifs sur les contrats habitation de ses jeunes assurés (apprentis, étudiants et saisonniers) ; Société Générale offre des réductions pour les jeunes actifs en assurance automobile et pour les étudiants en assurance habitation. Enfin, la Maif gel ses tarifs en assurance habitation pour les contrats des jeunes sociétaires.
- Les demandeurs d’emplois : Axa France offre 100€ aux demandeurs d’emploi de moins de vingt-cinq ans lors du renouvellement de leur contrat automobile.
- Les adhérents affectés par un COVID long : La Matmut rembourse quatre séances avec un psychologue aux sociétaires concernés.
- Les mesures prises afin de récompenser les comportements vertueux visent deux types d’adhérents :
- Les conducteurs prudents, non impliqués dans des accidents : Generali lance un programme de prévention permettant à l’ensemble des conducteurs sans sinistre depuis 3 ans de bénéficier de 50% de réduction sur leur franchise automobile et 75% de réduction pour 5 ans sans accident. Axa gèle ses primes IARD pour tous les clients de moins de 30 ans sans sinistre.
- Les acheteurs de véhicules hybrides ou électriques : Matmut gèle les tarifs de contrats concernant ce type de véhicules et Axa diminue de 100€ la prime d’assurance automobile pour les assurés qui remplacent leur véhicule thermique par un véhicule électrique.
En plus des mesures à destination des sociétaires, les assureurs prennent des actions vis-à-vis de leurs salariés
Certains acteurs ont fait face à des mouvements de grève avec comme principal mot d’ordre une revalorisation collective des salaires en cohérence avec le contexte inflationniste. Groupama Gan a ainsi acté une augmentation collective des rémunérations qui prendra effet fin octobre, mesure qui n’avait pas été prise depuis 10 ans au sein du groupe. Le groupe Matmut a quant à lui annoncé la distribution d’une prime de partage de la valeur d’un montant de 900€ à destination de tous les collaborateurs du groupe mutualiste.
Les assureurs : une profession qui montre à nouveau son soutien à l’économie française, notamment en période de crise
À l’instar de la période de crise CoVid, les assureurs contribuent une fois de plus dans l’effort de sortie de crise et de relance de l’économie. En 2020, malgré des controverses, le montant des mesures de soutien en faveur des particuliers et des entreprises s’élevait à 2,6 milliards d’euros. Bien que de moindre ampleur, les mesures prises au regard de la crise actuelle rappellent le poids et l’importance du secteur assurantiel dans la vie économique française.
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