10/10/19

« Tout numérique 2022 » : un enjeu de conduite du changement à l’échelle nationale

Dépôt de plainte, déclaration d’impôt, inscription des enfants à l’école… d’ici 2022, toutes les démarches administratives devraient être dématérialisées et réalisables sur Internet. Si cette transformation rime pour beaucoup de Français avec simplification, WeTechcare nous rapporte en 2017 que 32% des Français déclarent pourtant « ne pas être en mesure de réaliser, seuls, leurs démarches en ligne ». 
Dans quelle mesure cette transformation numérique de l’Etat va-t-elle permettre d’être un moteur de l’inclusion numérique en France ?

MALGRÉ LES INVESTISSEMENTS ÉTATIQUES, LA FRACTURE DU NUMÉRIQUE S’AMPLIFIE EN FRANCE​

Pour répondre à l’exaspération des foyers français victimes de la fracture numérique et dans une démarche d’inclusion numérique, le gouvernement a annoncé en 2018 un plan de formation doté d’un budget de 75 à 100 millions d’euros. Ce plan a pour objectif de former 1,5 millions de personnes par an aux outils numériques. Malgré cela, la fracture perdure et résulte de quatre « cassures » préexistantes :

  • « Cassure générationnelle » : les personnes âgées, sont majoritairement représentées au sein des personnes en difficulté face à l’usage des outils numériques et d’Internet. Moins bien équipés de manière générale, et moins expérimentés et « pratiquants », 39% des Français de plus de 70 ans estiment que les outils numériques sont difficiles à utiliser, et 20% d’entre eux trouvent également qu’il est difficile de naviguer sur Internet (Enquête sur « l’illectronisme » en France réalisée par le CSA en 2018)
  • « Cassure sociale » : les personnes non diplômées et celles avec un bas revenu sont la seconde frange de la population principalement touchée par ce rejet ou manque d’aisance avec le numérique. WeTechCare, dans son dossier de presse « Ensemble pour un numérique inclusif», révèle que 74% des Français non diplômés et 40% des personnes avec un bas revenu ne sont pas à l’aise avec les démarches numériques.
  • « Cassure territoriale » : imbriquée avec les deux premières, on constate une sur représentation des populations en retard face au numérique en zones rurales, généralement moins connectées et exposées au numérique. En 2017, 541 communes françaises ont été répertoriées en « zone blanche » c’est-à-dire non couvertes par le réseau téléphonique, et par conséquent sans possibilité de connexion Internet.
  • « Cassure des parcours client » : les « abandonnistes » représentent 19% de la population totale française. Il s’agit de tous ceux qui, tout aussi équipés que la moyenne, abandonnent des procédures administratives initiées en ligne, rebutés par les parcours digitaux laborieux au regard des bonnes pratiques des acteurs privés. L’article publié par Digital Academy en septembre 2018 statut que parmi ces personnes en situation de blocage et d’abandon du numérique, on retrouve entre autres, 21% de « digital natives » : des jeunes de moins de 35 ans, étant tout à fait acculturés au numérique lorsqu’il s’agit des réseaux sociaux, mais bien moins compétents lorsqu’il s’agit des démarches administratives. Habitués à des parcours numériques très fluides, ils ont tendance à abandonner sans résister les démarches qui présentent des dysfonctionnement, délais d’attente et autres problèmes techniques.

LA DÉMATéRIALISATION DES SERVICES PUBLICS EST UN CHALLENGE AVANT TOUT « HUMAIN » POUR L’ETAT​

Afin de ne pas être vécu comme une « marche forcée », le programme CAP 22 devrait être jumelé avec des solutions d’accompagnement et de conduite du changement pour tous les individus qui ne sont pas encore autonomes dans leurs usages du numérique. Le Baromètre du numérique (financé par Arcep-CGE-Agence du Numérique, en 2016) évaluait à 40% la part de la population française inquiète à l’idée de devoir réaliser ses démarches administratives en ligne et à 28% la part de ceux attendant une aide des pouvoirs publics afin de les accompagner. De plus, en 2018, 29% des abandonnistes renonçaient à effectuer en ligne une démarche d’aide ou de dédommagement auxquels ils auraient pu avoir droit.

Le projet « Tout numérique 2022 » représente donc un réel challenge pour l’Etat, et qui a été traduit à travers trois axes de travail :

  • Atteindre et orienter les publics cibles : définir les catégories d’usagers en situation d’exclusion numérique (débutants, intermédiaires, avancés) et construire des parcours d’orientation adaptés à chacun de ces publics en fonction de leurs freins et de leurs motivations. En fonction du niveau de compétences, proposer une offre d’assistance, de formation ou de « coup de pouce »
  • Structurer l’offre de médiation et de formation : qualifier et structurer l’offre d’accompagnement au numérique dans les territoires afin d’améliorer sa visibilité
  • Mobiliser les financements nécessaires : déterminer les mécanismes et dispositifs de financement existants efficaces et identifier les nouvelles sources de financement

La difficulté de la mise en place de l’inclusion numérique réside dans le fait que les personnes les plus éloignées du numérique aujourd’hui sont également les personnes les plus réticentes à s’y former.

L’état DÉPLOIE UN PROGRAMME INCLUSIF AFIN DE PALLIER CETTE FRACTURE NUMÉRIQUE​

Dans la continuité des mesures déjà entreprises et afin de mener au mieux la transformation numérique des services publics, l’Etat envisage de déployer un programme solide d’accompagnement et de formation pour les personnes les plus en marge. Il doit travailler de pair avec toutes les parties prenantes de la révolution numérique, qu’il s’agisse des collectivités locales, acteurs de terrain, spécialistes du numérique ou encore des entreprises privées.

Ainsi, l’Etat met en place « La mission société numérique », qui a vocation à accompagner la transition numérique des territoires en matière d’usages, d’accès aux droits et de services. La mission s’appuie sur trois piliers : l’inclusion numérique, la culture numérique, et le développement territorial.

 En lien avec cette mission, le plan « Pass Numérique » est actuellement en cours de déploiement par l’Etat. Il s’agit d’un dispositif permettant un accompagnement ciblé et local des personnes en difficulté face au numérique, et ce avec une prise en charge totale ou partielle par un tiers-payeur. 

C’est la première fois que le gouvernement déploie une démarche qui associe tous les acteurs de la société et avec pour but de fédérer et coordonner ces derniers. Des partenariats, associations ou acquisitions d’entités publiques ou semi-publiques sont alors essentielles au bon déroulement de ce programme, et parmi ces dernières, on retrouve :

Association qui accompagne depuis 2010 les personnes en état de précarité sociale et numérique vers les opportunités du numérique : formations, accès à l’équipement numérique et à la connexion, médiation avec des opérateurs téléphoniques…

Start-up à vocation sociale, financée par la fondation Google.org, qui a pour vocation la conception de plateformes webs d’apprentissage gratuites pour les publics éloignés du numérique. Propose également des parcours pédagogiques pour redonner confiance aux jeunes en insertion. WeTechCare accompagne également les collectivités dans leur stratégie d’inclusion numérique.

PIX est une structure 100% publique créée pour répondre au défi de la transition numérique; à but non lucratif, elle réunit différents acteurs publics engagés dans les domaines de l’éducation et de la formation. Elle propose une plateforme en ligne gratuite d’évaluation et de développement des compétences numériques et vend une offre de certification sur les 5 grands domaines du numérique. PIX contient des tests de positionnement sur un ensemble de 16 compétences numériques « transversales » (c’est-à-dire s’appliquant à tous les profils : étudiants, citoyens, salariés,…) ainsi que des ressources externes d’apprentissage.

Un risque persiste quant au succès de l’intégration numérique entreprise par l’Etat, mais les retombées sociales et économiques sont telles que le challenge vaut la peine d’être relevé.

Il reste de la place sur le marché de la formation, de l’acculturation et de l’accompagnement au numérique. De nombreuses initiatives sont encore à prendre, et ce pour des entreprises de tous les secteurs. Les acteurs du transport, de la mutuelle, des services publics, de la grande distribution… peuvent tous trouver leur intérêt en s’engageant dans cette transformation, en dématérialisant leurs offres ou services clients, afin d’optimiser leurs process et participer à l’acculturation générale au numérique.

VERTONE a également son rôle à jouer dans cette transformation numérique, en accompagnant ses clients dans la définition de leur stratégie de digitalisation ou le déploiement d’offres se rattachant à cette dématérialisation.

Retrouvez notre offre dans le secteur public.

Article rédigé par Sébastien VIDET et Clotilde LAMORLETTE