Légalisation des casinos en ligne en France : quels enjeux pour les casinotiers terrestres ?
L’industrie des jeux d’argent et de hasard est à l’aube d’une petite révolution avec l’éventuelle légalisation des casinos en ligne en France à horizon 2025.
Des études récentes révèlent que ce marché, jusqu’ici illégal et composé de 510 sites internet accessibles en France, pèserait un produit brut des jeux (PBJ) estimé entre 748 M et 1,5 Mds € (soit entre 5 et 11% du marché global des jeux d’argent) et serait porté à hauteur de 79% par des joueurs ayant des pratiques de jeu à risque selon une étude publiée par l’ANJ en 2023.
Face à l’isolement de la France sur ce sujet – les autres pays en Europe continentale ayant déjà autorisé les casinos en ligne hormis Chypre – et à l’incapacité de protéger pleinement les joueurs sur ce marché noir, un projet de loi sur l’ouverture des casinos en ligne a vu le jour en 2023, ouvrant la voie à un marché contrôlé. Ce projet de loi préconise dès 2025, une période transitoire de cinq ans qui laisserait aux casinos physiques traditionnels français la possibilité d’opérer cette nouvelle activité en s’appuyant sur des sociétés de fourniture et de maintenance, avant d’octroyer une ouverture complète à la concurrence en 2030.
Un cadre législatif en faveur de la protection des joueurs et de nouvelles sources de revenus
La légalisation pourrait signer la fin d’un long combat pour l’ANJ, l’Autorité Nationale des Jeux, qui peine à fermer les plateformes illégales et à endiguer le flot de joueurs français qui y affluent. L’ANJ pourrait ainsi réorienter ses efforts vers la régulation et le contrôle des opérateurs légaux, visant à réduire la part du jeu excessif et renforcer la protection des mineurs, en appui de son plan stratégique 2024-2026.
En effet, l’autorisation des casinos en ligne obligerait les opérateurs à mettre en place des dispositifs de contrôle visant à améliorer la lutte contre l’addiction aux jeux d’argent et l’interdiction de jeu aux mineurs. Par exemple, comme c’est le cas aujourd’hui sur les sites de paris sportifs, les mesures pourraient inclure la vérification de l’identité des joueurs, la fixation de limites de dépôt, l’auto-exclusion volontaire, l’accès à des outils d’auto-évaluation, l’encadrement de la publicité et l’obligation de financer des programmes de prévention de l’addiction.
Toutefois, des voix s’élèvent contre ce projet de loi visant à légaliser les casinos en ligne, exprimant des préoccupations sérieuses sur les risques de santé publique d’une telle mesure. Quatre addictologues et un socio-épidémiologiste ont récemment alerté dans une tribune du FigaroVox sur les dangers des casinos en ligne, considérés comme une véritable drogue, qui « créent une dépendance plus rapide que les autres types de jeux de hasard, en lien avec leurs prises de risque solitaires, continues et rapides, toutes les trois à quatre secondes, sans délai entre un jeu et le suivant ».
De plus, la légalisation des casinos en ligne pourrait transformer un marché noir, entaché par le blanchiment d’argent et l’opacité des opérations basées dans des paradis fiscaux. En soumettant ce nouveau secteur aux mêmes règles que les casinos traditionnels, l’État percevra des taxes significatives sur les activités de jeu en ligne, ouvrant ainsi une nouvelle source de revenus fiscaux.
Les casinotiers français autrefois réticents mais désormais prêts à relever ce défi
Longtemps hostiles à la légalisation, les groupes de casinos français ont néanmoins réévalué leur position à la suite de la pandémie de Covid-19 ayant démocratisé les usages digitaux. Ils reconnaissent désormais qu’une ouverture du marché en ligne pourrait constituer un relais de croissance leur permettant d’attirer un public plus jeune.
Si le projet de loi est adopté, les opérateurs de casinos terrestres seront néanmoins confrontés à de nombreux défis au regard des différences notoires des deux offres entre elles :
CONSTRUIRE SA PROPOSITION DE VALEUR
- Comprendre le profil du joueur de casino en ligne, leurs attendus et besoins ;
- Construire une nouvelle offre et des services adaptés, en adéquation avec son image de marque et ses actifs, les codes du jeu en ligne et conforme aux recommandations et exigences du régulateur ;
- Se doter d’une plateforme digitale moderne nécessitant de forts investissements technologiques et de contractualiser avec une société de fourniture et de maintenance.
RECRUTER… ET FIDÉLISER avant l’échéance de 2030
- Développer une stratégie d’acquisition et de fidélisation avec une expérience de jeu de qualité auprès des joueurs existants habitués à consommer une offre illégale — sans le savoir pour 1 joueur sur 2 – et soutenant des pratiques de jeu excessives (jeu rapide accessible 24h/24 et sans pause, offre plus large, générosité plus forte, univers de jeu agressif, aucune modération de jeu, etc…) ;
- Développer des usages mixtes de leurs propres joueurs.
Cette priorité donnée aux casinotiers physiques sur cette période ne retire pas la capacité des géants du jeu en ligne, ayant une présence établie en Europe, à préparer dès à présent leur positionnement pouvant leur permettre d’atteindre des seuils de rentabilité – difficiles à atteindre – dans une approche multi-offre et multi-pays.
Conclusion
Cette éventuelle légalisation du marché des casinos en ligne pourrait bouleverser les équilibres de la filière – sans toutefois venir éradiquer le marché noir en premier lieu au regard du volume de joueurs actifs, avec de fortes inconnues quant à la stratégie et au positionnement des acteurs en présence.
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