30/07/24

Retour sur le petit déjeuner Fidélité & Impact Captain Cause x VERTONE : bonnes pratiques sur le marketing responsable et la fidélité client

(c) François Tancré

Le 19 juin, VERTONE organisait au Bivwak son premier Petit Déj « Fidélité & Impact » en partenariat avec Captain Cause, sur le RSE et les enjeux de fidélisation, en présence de plus de 50 responsables marketing.

Après une capsule introductive, par Frédéric Mazzella (fondateur de Blablacar et de Captain Cause), une table ronde arbitrée par Frédéric Estève (Partner VERTONE) a rassemblé Barbara Sessa (SVP Head of Consumer Products Europe chez MASTERCARD), Maxime Gareau (VP Global Loyalty chez ACCOR et Thomas Szygula (Head of Marketing « Mon Programme pour agir » chez ENGIE, sur le thème : « Vers des marques citoyennes : quelles opportunités pour développer la fidélité des clients ? » La matinée s’est conclue par un échange entre Arnaud Viody (partner VERTONE) et Georges Basdevant (CEO de Captain Cause) sur le thème « La RSE, oui, mais comment » ? »

Des échanges et interventions, sont ressortis des solutions concrètes et des exemples d’initiatives pour répondre aux enjeux convergents de la RSE et de la fidélisation, ainsi que plusieurs conditions de succès du positionnement de marque citoyenne auprès du client final.

L’engagement citoyen des marques : répondre à une demande sociétale par une offre de rupture

Dans sa capsule introductive, Frédéric Mazzella est parti des constats suivants :

  • 96% de nos concitoyens sont frustrés car ignorent comment agir pour rendre leur consommation plus responsable
  • 90% considèrent que c’est aux grandes marques et entreprises de les résoudre : « A grand problèmes, grands solutionneurs »
  • 76% sont prêts à changer de produit ou de service en faveur d’une entreprise proposant une offre identique avec un meilleur impact.

En revanche, on observe aussi que le changement effectif de comportement n’est pas pleinement à l’œuvre parmi les consommateurs, qui ne s’avèrent pas prêts à aligner leurs actes sur leurs ambitions quand il s’agit de payer un prix plus élevé. Comme l’a soulevé Barbara Sessa (de MASTERCARD) au cours de la table ronde, les enjeux environnementaux sont facilement relégués au second plan dans les arbitrages quotidiens : ainsi des « Gen Z » et des « Gen Alpha » qui, à 96%, déclarent vouloir une marque en phase avec leurs valeurs, mais dont le premier poste de dépenses est l’habillement, en particulier la « fast fashion ».

Face à ce paradoxe, la meilleure réponse des entreprises n’est pas nécessairement de partir d’une approche « customer-centric » en identifiant une demande préexistante, mais d’accompagner le changement de comportement par une proposition innovante, anticipant les évolutions sociales et réglementaires futures. Comme le note encore Barbara Sessa, « Il faut penser ESG by default. L’ESG est aujourd’hui ce qu’était le digital il y a dix ans : même si les comportements n’ont pas encore changé, il faut aller dans cette direction – et le client suivra. »

La fidélisation : un levier pour marquer l’engagement et initier le changement

Les dispositifs relationnels, à commencer par les programmes de fidélité, permettent d’incarner les valeurs portées par les marques tout en offrant l’occasion de gommer les irritants rencontrés par les clients quand il s’agit d’engagement RSE. Arnaud Viody, partner VERTONE, mentionne trois irritants principaux :

  • Le prix – qui, comme on l’a vu plus haut, a un effet dissuasif sur l’engagement
  • La routine, le connu, l’habitude – qui déresponsabilisent
  • La méconnaissance – la transparence sur le caractère responsable de nos produits n’étant pas toujours assurée.

Un programme de fidélité permet à la fois de gérer la barrière du prix, de faire de la pédagogie sur l’offre de produits et de services, et de responsabiliser. ENGIE, par exemple, promet avec « Mon Programme pour Agir » de protéger le pouvoir d’achat tout en apportant du sens au client, en récompensant la sobriété énergétique.

Pour ce faire, les approches purement transactionnelles et servicielles des programmes de fidélité doivent être dépassées, au profit d’une dimension relationnelle et émotionnelle plébiscitée par les clients. La dimension relationnelle permet de passer du client « Roi » – objet de toutes les faveurs promotionnelles des marques – au client « Moi », appelé à développer une dimension de sa personne. Il s’agit enfin de passer au niveau du client « Soi » : « en agissant, je sauve quelque chose, ma vie acquiert un sens ».

À titre d’exemple, DECATHLON soigne toutes les dimensions « Roi – Moi – Soi » de ses clients dans son programme de fidélité : en leur proposant de cumuler des points, d’abord en faisant des achats ; ensuite en pratiquant une activité sportive ; enfin en réalisant des actions pour la planète. L’enseigne CULTURA, quant à elle, permet à ses membres de cumuler doublement des points sur les achats de seconde main, mais aussi de transformer leurs points en participant à des ateliers créatifs.

La traduction des enjeux RSE dans la feuille de route marketing & fidélisation : exemples et bonnes pratiques

Les discussions entre les intervenants de la table ronde ont permis de faire émerger plusieurs bonnes pratiques pour introduire les engagements RSE dans la stratégie marketing des entreprises, et les traduire en offre concrète auprès des clients.

Intervenants table ronde Marketing Responsable Fidélité Captain Cause x VERTONE

Chacune pionnière dans son secteur, les entreprises représentées ont saisi l’opportunité d’inclure la RSE dans leur stratégie d’une façon adaptée à leur modèle, et avec des OKR (« objectives key results ») appropriés :

  • Chez ENGIE, l’ambition est d’être « NET Zéro » avant 2045, grâce notamment à la fermeture des centrales à charbon en 2027, et à l’incitation à consommer moins d’énergie – de gaz en particulier – chez soi. La sobriété énergétique est au cœur des objectifs de l’entreprise, avec trois volets : réduire la consommation, verdir l’énergie, et compenser le carbone. Sur le premier volet, le dispositif « Mon Programme pour agir » – qui rassemble déjà un million de participants actifs – invite les clients à consommer moins d’énergie.
  • MASTERCARD, entreprise de services financiers dont le modèle est « B2B2C », a formulé l’ambition d’un « 0 net impact » en 2040 en encourageant notamment autant que possible la dématérialisation des 3 millions de cartes en circulation. Mastercard a par ailleurs inscrit au cœur de sa feuille de route, le projet de favoriser une économie numérique inclusive, par exemple en accompagnant des petites et moyennes entreprises fondées par des femmes. Tous les employés de Mastercard ont une part variable indexée sur l’atteinte des objectifs ESG.
  • Le groupe ACCOR, quant à lui, a formalisé ses engagements à travers ses quatre piliers :  favoriser l’inclusion des employés, réduire l’impact carbone de l’activité hôtelière, optimiser la gestion des ressources, enfin préserver les écosystèmes naturels et culturels des destinations. Les enjeux RSE du groupe sont traduits au niveau de chaque département via des OKR (« objective key results ») et des bonus incitatifs aux équipes : pour le programme de fidélité, cela peut se traduire par la conception de mécaniques à impact positif.

Ces engagements RSE se traduisent à travers des initiatives concrètes grâce aux possibilités offertes par les programmes de fidélité :

  • ENGIE choisit de récompenser les actions vertueuses des membres de « Mon Programme pour Agir », telles que l’installation d’une pompe à chaleur ou la participation à un MOOC sur la transition énergétique. La dimension fidélisante du programme se mesure lors des déménagements et changements de contrats : la part de clients ENGIE renouvelant leur contrat se révèle plus élevée chez les membres du programme.
  • MASTERCARD propose au client final un calculateur carbone pour mesurer l’empreinte générée par ses achats ; ainsi que des contenus et des actions pour l’inspirer et l’engager.
  • ACCOR donne la possibilité aux membres de son programme ALL de gagner 100 points (lesquels disposent d’une valeur faciale transparente en €) en choisissant l’option SKIP THE CLEAN par laquelle ils renoncent au ménage quotidien de leur chambre, permettant ainsi de réduire la consommation d’eau et de produits d’entretien.

Un exemple de mécanique innovante : Captain Cause

Se fondant sur le constat que le marketing traditionnel ne suffit plus pour attirer la fidélité des clients, les équipes de Captain Cause menées par Georges Basdevant proposent une solution pour aligner les valeurs de marque et les actions des clients, en soutenant des causes de manière authentique. Ses principaux piliers : sensibiliser le plus grand nombre de personnes aux enjeux environnementaux et sociétaux ; envoyer un maximum de personnes sur le terrain.

Au cœur de son offre, la mécanique du dift (don + gift) : permettre aux marques de créer des pages personnalisées de soutien à des opérations sociales ou environnementales, et engager leurs parties prenantes (collaborateurs ou clients) à soutenir les projets qui ont le plus de sens pour eux en envoyant des « difts ».

En pratique, le dift assure un effet multiplicateur au taux d’engagement des clients : on observe ainsi une multiplication par six du taux de clic des courriels lorsque l’objet mentionne une action positive, au-delà du produit ou service proposé.

L’effet s’observe directement sur l’engagement du client auprès de la marque : ainsi le zoo de Beauval a constaté, à l’issue d’une campagne de dons, que 43% des donneurs ont souscrit à la newsletter.  Avec un effet concomitant sur le bouche-à-oreille : chaque personne ayant fait en « dift » en parle en moyenne à 2,6 personnes autour d’elle.

Une autre opération phare a été menée avec ACCOR : une campagne de dons auprès des membres du programme All.com, par laquelle le groupe s’engageait à doubler la somme collectée. Avec succès : cette collecte auprès des membres s’est élevée à 60 000€. Maxime Gareau (VP Loyalty du groupe) note que le taux de clic sur l’encart « faites un don » est quatre fois supérieur à la moyenne.

Les conditions du succès : la transparence, la reconnaissance et le passage à l’échelle

Les initiatives RSE ou ESG, comme les dons, peuvent éveiller de la méfiance. Comme le note Georges Basdevant, CEO de Captain Cause, les donneurs n’ont pas toujours confiance en la bonne utilisation qui sera faite de l’argent qu’ils donnent. Les discussions entre les participants ont permis de dégager trois facteurs favorisant l’adoption des initiatives par le client final :

  • La transparence dans l’information communiquée au client. Selon Barbara Sessa (de MASTERCARD), les critères ESG doivent être intégrés dès la conception du produit, puis communiqués au client sous forme de données transparentes, simples et bien présentées afin de permettre un choix éclairé et engagé (par exemple, dans les situations où la production locale et la qualité impliquent un prix plus élevé). De façon concrète, Captain Cause, afin de parer à la défiance des donneurs (ou « difteurs ») sur l’utilisation qui est faite de leur argent, leur fournit un accès à des statistiques détaillées sur leur impact réel.
  • Les remerciements à l’égard des clients qui pratiquent des comportements vertueux. Thomas Szygula note que, dans le cadre de « Mon programme pour Agir » d’ENGIE, les campagnes CRM affichant le taux de clic le plus élevé sont celles où le fournisseur dit explicitement « merci » au client, en lui présentant un bilan de ses actions.
  • Enfin, le passage à plus grande échelle des initiatives à impact. Selon Maxime Gareau (du groupe ACCOR), une initiative concluante doit être menée à grande échelle afin d’acquérir de la crédibilité, et ne pas tomber dans la suspicion de « greenwashing ».

Ainsi cette matinée a-t-elle permis de dégager les grands axes de travail pour ouvrir une nouvelle ère du marketing : plus émotionnelle, plus responsable et plus solidaire.

Un article rédigé par

William D
William D

Consultant