26/07/13

La conduite du changement en milieu associatif : comment convaincre les bienfaiteurs qu’on peut mieux faire du bien ?

Les associations face à un environnement plus exigeant

Les exigences envers les associations humanitaires sont devenues aussi fortes qu’à l’égard des entreprises. Les évolutions réglementaires et la demande de transparence des donateurs les contraignent à un plus grand professionnalisme et une plus grande rigueur. Les associations ne sont plus épargnées par le reporting et le contrôle de gestion, et elles se voient appliquer les mêmes contraintes que le secteur marchand.  C’est le cas par exemple pour la distribution de l’aide alimentaire, en matière de gestion des stocks, d’hygiène et de sécurité alimentaire, avec de nouvelles exigences de traçabilité et de production d’indicateurs proches des normes de la Grande Distribution.

En parallèle, leur environnement devenu très concurrentiel les a entraînées bon gré mal gré au cœur d’un charity business, où chacune doit attirer puis retenir ses donateurs, mais également et surtout les hommes et les femmes qui matérialisent leurs actions sur le terrain.

Le rôle des ressources humaines : un enjeu clef dans la mise en œuvre du changement en milieu associatif

Le recrutement et la fidélisation de bénévoles est un enjeu majeur pour une association et la pérennité de son action. Ainsi, les structures composées principalement de bénévoles font face à un double défi.

D’abord, le statut du bénévole, dont l’engagement est libre, volontaire et désintéressé, le libère de toute exigence de résultat : le pouvoir de coercition est faible face à des collaborateurs qui travaillent pour la bonne cause !

Ensuite, les bénévoles ne voient pas toujours d’un bon œil l’apparition de contraintes et la nécessité d’acquérir des compétences nouvelles : dans le cadre de leur engagement, ils aspirent souvent à plus de souplesse que dans le monde rigide de l’entreprise.

L’évolution des méthodes de travail dans les associations, exigée par les pouvoirs publics, peut ainsi conduire à un découragement, voire au désengagement de ces ressources précieuses à plus d’un titre, surtout lorsqu’on sait que le manque de ressources humaines est l’une des principales causes de disparition des associations.

Toute la difficulté réside donc pour l’association dans l’atteinte des trois objectifs suivants : recruter des bénévoles, professionnaliser leur action, répondre à leurs aspirations pour conserver leur investissement personnel dans la durée.

Entre fermeté et tentation du compromis, montrer que le changement mis en œuvre est bénéfique pour tous

Dans ce contexte, il est donc toujours délicat d’imposer des changements drastiques de règles de gestion aux bénévoles. D’un côté, la tentation du compromis est forte : ne pas brusquer le changement, pour ne pas faire fuir les bénévoles, au risque de passer à côté du fond des évolutions qui doivent s’imposer. De l’autre côté, savoir rester ferme sur l’avancée des projets de modernisation pour montrer que le changement n’est pas superflu.

Pour garantir le succès de tels bouleversements, une autre voie est possible : la valorisation du rôle essentiel de tous dans des évolutions qui seront également bénéfiques à l’association, à ses bénéficiaires et à ses bénévoles. La réussite de la transformation passe ainsi par deux éléments : la création d’un projet retenant l’adhésion des bénévoles, et la mise en lumière des bénéfices apportés par le changement, pour tous.

En effet, la mise en œuvre des projets de modernisation, au-delà d’une réponse nécessaire aux exigences des pouvoirs publics, est une avancée essentielle pour les associations :

  • Celles-ci y gagnent en efficacité de leurs actions auprès des bénéficiaires par une meilleure allocation des ressources. Les changements mis en œuvre et en particulier le reporting des actions des associations permettent de valoriser l’association et ses bénévoles, en donnant une mesure concrète des heures de bénévolat mobilisées d’un côté, et des bénéficiaires couverts par la mission de l’association de l’autre.
  • L’acquisition de compétences nouvelles et de nouvelles méthodes de travail permet aussi aux bénévoles d’évoluer dans un environnement valorisant et professionnalisant. Cette évolution permet aux bénévoles d’être en mesure de valoriser leur expérience du bénévolat dans un cadre professionnel.

Ces mesures permettent à terme aux associations de bénéficier d’une meilleure visibilité et d’une réelle reconnaissance à l’extérieur, et in fine, d’être en capacité de demander des subventions à l’État et de justifier leur utilisation.

La mise en œuvre de changements durables passe aussi par une méthodologie de projet adaptée au milieu associatif

Le recours à une méthodologie adaptée aux spécificités du milieu associatif est clef dans la conduite du changement. Parmi les bonnes pratiques, on retiendra l’implication des bénévoles dans les phases amont des projets de modernisation. Cela passe par exemple par l’invitation de bénévoles à des réunions de cadrage de leurs besoins où ils pourront s’exprimer et participer à la définition des solutions grâce à leur expérience et à leur bonne connaissance du terrain. Cette démarche permettra aussi de consacrer la pertinence du projet et sa crédibilité aux yeux des autres bénévoles.

Pour un réseau associatif, dans le cadre d’un projet de transformation, le lien entre le siège et le terrain doit être entretenu, voire renforcé. Le siège doit montrer son implication et sa compréhension des enjeux du terrain, en multipliant les échanges. Ainsi, l’organisation de visites de représentants du siège pour échanger avec les équipes bénévoles (en amont et jusqu’à la transformation) et la formation de bénévoles-relais par région pour aider au déploiement permettront une meilleure appropriation du projet par l’ensemble des parties prenantes.

Parmi les bonnes pratiques, on citera aussi le diagnostic organisationnel des différentes entités avant le déploiement pour proposer de nouveaux modes organisationnels qui pérennisent le changement, l’organisation de pilotes avec les entités locales les plus engagées pour tester les recommandations émises, la proposition de solutions de contournement personnalisées pour faire vivre le projet de modernisation face aux associations les plus réticentes et surtout un effort de formalisation, nécessaire dans un univers où la culture et les échanges sont essentiellement oraux.

En conclusion, toute la difficulté d’un projet de modernisation d’une association humanitaire réside dans le maintien de l’objectif de « faire le bien ». L’action bienfaitrice peut être ressentie comme amoindrie dès lors que des contraintes apparaissent comme chronophages et rébarbatives, mais l’adhésion au projet peut être gagnée si la preuve est apportée que la transformation améliore la qualité du service rendu aux bénéficiaires.

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