28/04/20

Coronavirus : les acteurs de la banque et de l’assurance ont renforcé leur mobilisation, non sans limites et difficultés

Deux semaines se sont écoulées depuis notre premier partage des principaux types de mesures prises par les acteurs des secteurs de la banque et de l’assurance en France dans le contexte de la crise sanitaire due au COVID-19. Ce dernier a depuis connu des évolutions sensibles.

Le confinement des Français a de fait été prolongé au-delà du 15 avril 2020. Un appel au maintien de leurs efforts et, plus spécifiquement, à davantage de mobilisation de la part des acteurs de la banque et de l’assurance a été réalisé par le Président de la République Emmanuel Macron lors de son allocution du 13 avril 2020. Un objectif de déconfinement progressif à partir du 11 mai 2020 a également été fixé lors de cette intervention, avec la présentation d’un plan de déconfinement fin avril 2020.

Parallèlement, la France poursuit son entrée dans une crise économique majeure. La Banque de France estime ainsi que chaque quinzaine de confinement entraîne près de 1,5% de perte de produit intérieur brut (PIB) annuel et presque autant en déficit public supplémentaire

Dès lors, intéressons-nous plus avant aux nouvelles actions des acteurs de la banque et de l’assurance prises dans ce nouveau cadre.

Toujours plus de solutions pour les professionnels et les particuliers

Les banques et les assureurs ont continué de s’organiser pour assurer une continuité d’activité

Si les services à distance sont toujours poussés par les banques et des assureurs, certains d’entre eux ont accru le nombre de points de contacts physiques ouverts à leurs clientèles. La Poste a ainsi porté le nombre de bureaux de poste opérationnels à 2 500. Elle entend poursuivre ses efforts pour que 5 000 bureaux de poste soient ouverts d’ici la fin avril avec des niveaux de service, Banque Postale incluse, adaptés.

La filière Achats du Groupe BPCE a pour sa part poursuivi sa mobilisation et son adaptation en vue d’assurer le maintien des activités du groupe et de celles des fournisseurs. Outre les besoins en équipements de protection, elle a dû gérer les relations avec les prestataires, avec une attention particulière pour les plus fragiles d’entre eux d’un point de vue financier.

De nouvelles mesures exceptionnelles ont été prises pour aider les clients à faire face à la crise sanitaire et à ses impacts

AG2R La Mondiale a, de cette façon, indiqué débloquer, sous conditions, « une aide financière forfaitaire d’un montant de 300 € par salarié ayant eu un arrêt de travail de plus de 30 jours, dans une limite proportionnelle à la taille de l’entreprise ».

BNP Paribas a décidé de proposer aux étudiants une nouvelle offre de prêt de 5 000 euros à taux 0, sans frais de dossier.

Des messages de soutien, d’engagement et de remerciement ont aussi été adressés aux clients

Le directeur général de LCL a récemment souhaité exprimer dans un mail son soutien à ses clients, l’étendue de l’engagement de tous les collaborateurs de LCL ainsi que ses remerciements à tous ceux qui s’investissent pour la collectivité quotidiennement face à la crise sanitaire, d’après un mail client du 15 avril 2020.

Davantage de contributions à l’effort national

Les secteurs de la banque et de l’assurance ont contribué à la mise en œuvre des politiques publiques

Des acteurs ont répondu à de nouvelles demandes de prêts garantis par l’Etat (PGE). Selon les derniers chiffres du gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau le 19 avril 2020, les banques ont enregistré 290 000 demandes de prêts pour un montant de 55 milliards d’euros.

Des banques et des assureurs ont rappelé les démarches administratives pour bénéficier des aides publiques. Le Crédit Agricole a ainsi regroupé sur son site internet les étapes à suivre pour les professionnels et dirigeants d’une très petite entreprise (TPE) / petite ou moyenne entreprise (PME).

Des acteurs de la banque et de l’assurance ont pris de nouvelles mesures allant au-delà d’un soutien à la mise en œuvre des politiques publiques ainsi que de leur périmètre clients

La contribution d’assureurs au fonds de solidarité mis en place par les autorités publiques et destiné à soutenir les petites entreprises et les indépendants a été portée à 400 millions d’euros (vs. 200 millions initialement).

Des mesures pour contribuer à la reprise de l’activité économique ont, par ailleurs, été envisagées. La présidente de la Fédération Française de l’Assurance (FFA) Florence Lustman a indiqué la mise en place d’« un programme d’investissement global d’au moins 1,5 Md€, majoritairement en fonds propres, tournées vers les ETI, les PME et le secteur santé ». Le président directeur général du Groupe Covéa, Thierry Derez estime d’ailleurs que l’engagement des assureurs sera « plus qu’utile dans la phase de reconstruction, de redémarrage de l’économie » et se dit « prêt à investir, y compris en fonds propres, dans les entreprises fragilisées ».

De nouvelles actions ont été prises pour accompagner les Français dans leur quotidien. Axa a, par exemple, relayé sur son compte twitter un article mentionnant les précautions à prendre pour faire ses courses pendant le confinement, issu de l’application Axa My Easy Santé. Generali a rappelé les incidences du confinement sur la garde des enfants pour des parents séparés. Via le site internet Le comptoir de la nouvelle entreprise, Malakoff Humanis aide les Français en télétravail à adopter les bonnes postures de travail.  

Des banques et des assureurs ont choisi de soutenir des initiatives permettant un meilleur confinement. Allianz accompagne la startup Cutii pour mettre à disposition des EHPAD ses robots compagnons et aider à rompre l’isolement de séniors. SwissLife soutient via sa fondation le projet solidaire de fabrication de masques pour des cliniques, EHPAD… du collectif de couturiers des Yvelines « Les Masques de la Boucle ».

Des réponses ne faisant toutefois pas toujours l’unanimité

Des entreprises ont indiqué avoir rencontré des difficultés d’accès au prêt garanti par l’Etat

Dans la mise à disposition des prêts garantis par l’Etat, les banques ont une certaine marge d’appréciation. En cas de refus de sa demande de prêt garanti par l’Etat, une entreprise peut contacter la Médiation du Crédit, service logé au sein de la Banque de France chargé de venir en aide aux entreprises rencontrant des difficultés de financement. Si celle-ci ne trouve pas de solution, le ministre de l’Economie et des Finances a indiqué le 17 avril 2020 qu’un prêt de l’Etat pourrait être accordé sous conditions à l’entreprise.

Des entreprises demandeuses d’un prêt garanti par l’Etat ont relaté des délais de traitement longs, des demandes de documentations importantes ou encore des refus de la part des banques. S’il n’existe pas à ce stade de statistiques précises sur ces cas et leurs motifs (temps d’adaptation, risques élevés…), il est à noter que les demandes à la Médiation du Crédit ont « explosé ». Selon François Villeroy de Galhau, la médiation du crédit reçoit en une journée davantage de demandes qu’en un mois l’année dernière.

Les assureurs-crédits sont davantage attendus

François Villeroy de Galhau a indiqué le 19 avril 2020 que davantage d’efforts étaient attendus de la part des assureurs-crédits, qui proposent des contrats d’assurance-crédit pour les entreprises contre le risque de factures impayées, même si des mesures ont déjà été décidées avec les autorités publiques.

Dans un communiqué du 10 avril 2020, la FFA a indiqué que « les principaux assureurs-crédit (Atradius, Axa Assurcrédit, Coface, Euler Hermes France et Groupama Assurance-crédit & Caution) s’engageaient à commercialiser des offres de couverture de crédits inter-entreprises selon un nouveau dispositif bénéficiant d’une réassurance par l’État ».

La non-couverture des pertes d’exploitation divise, y compris les assureurs

Depuis le début de la crise sanitaire, les assureurs sont très attendus pour prendre en charge les pertes d’exploitation impliquées par le COVID-19, même en cas d’exclusion du champ des garanties. Non sans polémiques, le Crédit Mutuel et le CIC se sont très récemment engagés à verser 200 millions d’euros à leurs clients professionnels assurés contre les pertes d’exploitation pour compenser une partie de celles dues au coronavirus. Le Crédit Agricole a également annoncé la mobilisation de « près de 200 millions d’euros » pour un « dispositif inédit de soutien pour tous les assurés ayant souscrit une assurance multirisque professionnelle avec perte d’exploitation ». MMA a, pour sa part, indiqué vouloir verser « une indemnité de crise sanitaire » à ses clients disposant d’une assurance multirisques professionnelle incluant une garantie de perte d’exploitation après incendie.

En conformité avec ses garanties contractuelles, la MAAF a déjà indemnisé les pertes d’exploitation sans dommages de professionnels de la restauration, pour un montant global de 190 millions d’euros. Selon L’Argus de l’assurance, BPCE IARD serait « prête à examiner le sort de 4 000 restaurateurs ayant souscrit une garantie en cas de fermeture administrative liée à une pandémie ».

Si l’indemnisation des pertes d’exploitation divise encore les acteurs de l’assurance, notamment en raison de contraintes en matière de solvabilité, de leur objet social et de leurs prérogatives, la réflexion sur un régime d’assurance pandémie pour l’avenir est appelée à se poursuivre. Les autorités publiques ont annoncé le 15 avril 2020 l’instauration d’un groupe de travail visant à la création d’un régime d’assurance pandémie, incluant le secteur de l’assurance, animé par le ministère de l’Economie et des Finances et devant remettre ses premières recommandations avant la fin du mois de juin 2020. Pour le président de Groupama Thierry Martel ce nouveau régime devrait être inspiré de celui des catastrophes naturelles.

Une préparation de l’après-confinement, encore teinté d’incertitudes, amorcée

Un nouvel appui au respect des gestes barrières se prépare dans le secteur de la banque

La Fédération Bancaire Française (FBF) a fait état du relèvement du plafond du paiement sans contact par carte de paiement à 50 euros à partir du 11 mai 2020. Cette évolution devrait permettre de limiter les possibilités de contamination, particulièrement dans le cadre du déconfinement progressif envisagé à partir de cette date. Le Crédit Mutuel a déjà affirmé dans un communiqué de presse datant du 17 avril 2020, que le groupe se mettait en ordre de marche pour assurer pour ses clients ce relèvement du plafond des paiements sans contact par carte de paiement à partir du 11 mai 2020.

Les initiatives des banques et des assureurs pour l’après-confinement sont encore bridées par de nombreuses inconnues

Dans l’attente du plan de déconfinement, prévu pour fin avril 2020, de nombreuses incertitudes demeurent pour les acteurs des secteurs de la banque et de l’assurance quant aux règles qu’ils devront respecter (port obligatoire du masque ou non…). Ces inconnues limitent, pour l’heure, la capacité de ces acteurs à préparer la sortie du confinement de leurs collaborateurs, partenaires et clients.

Comme l’a suggéré Benoit Serre, vice-président délégué de l’Association Nationale des Directeurs des Ressources Humaines (ANDRH), les entreprises peuvent néanmoins d’ores et déjà réaliser un diagnostic physique (configuration des locaux, endroits à risques, open-spaces, restaurants d’entreprise, circulation dans l’entreprise, déplacements externes…) et un diagnostic opérationnel (services nécessitant le plus une présence physique, personnes extérieures, rythme de reprise de l’activité, projets devant être maintenus, congés d’été…). Elles peuvent aussi déjà réfléchir à la dynamique managériale à recréer, avec des collaborateurs éprouvés par la crise sanitaire, dispersés (sur site ou en télétravail)…        

Les banques et les assureurs sont aussi appelés à se projeter sur les impacts de cette période afin de déterminer comment ils vont gérer l’après-confinement, au-delà du déconfinement progressif. 

Encore très sollicités dans la dernière quinzaine, les acteurs des secteurs de la banque et de l’assurance ont apporté de nouvelles réponses, pour assurer leur activité et contribuer davantage à l’effort national, non sans limites et polémiques. Ils portent désormais aussi leur attention sur « l’après-confinement ». La prise de mesures inédites par ces acteurs est donc loin d’être finie… alors rendez-vous en mai pour un nouveau point d’étape et, d’ici-là, faites-nous part de vos commentaires !

Un article rédigé par Laurence Boivin