Quelle stratégie de distribution en ligne pour les marques hygiène-beauté ?
En 2019, le chiffre d’affaire de l’hygiène-beauté a continué de reculer en volume comme en valeur, alors que les sites de vente généralistes et spécialisés beauté ont vu leur part de marché augmenter (source LSA).
Au regard de cette tendance, VERTONE a souhaité réaliser une étude sur 23 groupes détenant près de 281 marques hygiène-beauté distribuées en France, afin de dresser un panorama de leur stratégie de distribution en ligne.
Une distribution en ligne principalement indirecte
Sur les 281 marques hygiène-beauté de notre étude, 90% distribuent leurs produits en indirect en ligne et 17% d’entre elles vont même jusqu’à renvoyer le client depuis leur propre site vers un site e-retail partenaire (à défaut de proposer un site e-commerce en direct-to-customer).
Sur les 90% présentes en distribution indirecte :
- 86% passent par des e-retailers beauté (Sephora, Nocibé, Doctipharma, etc.)
- 59% par des pure players généralistes (Amazon, Cdiscount)
- 36% par des destockeurs (ex : Veepee, Showroomprivé, etc.).
On note toutefois des stratégies de distribution différenciées selon le secteur :
- La distribution par pure players généralistes et destockeurs n’est pas systématique, notamment pour les marques de dermocosmétiques qui sont 55% à ne pas utiliser ce réseau de distribution (34% pour les marques de parfumeur et 30% pour les marques de cosmétiques)
- Les marques d’hygiène distribuent plus facilement via des sites pure players généralistes (pour 88% d’entre elles vs. 59% en moyenne sur le marché hygiène-beauté) et via des destockeurs (pour 55% d’entre elles vs. 36% en moyenne sur le marché hygiène-beauté)
Notre ranking des distributeurs qui distribuent le plus de marques donne Amazon comme grand gagnant sur le marché au global et notamment sur les secteurs des cosmétiques et hygiène. Doctipharma arrive en tête sur le secteur dermosmétique et parfumeurs. Sephora arrive second pour les marques de cosmétiques et parfumeurs.
Comme mentionné dans notre article « Une marque doit-elle forcément lancer un site e-commerce ?« , les avantages de la distribution indirecte en ligne sont nombreux pour une marque ne possédant pas de réseaux de distribution en propre. Cela reste vrai pour les marques de beauté et encore plus d’hygiène.
Pour ces dernières, le prix des produits est souvent bas ce qui rend l’atteinte de rentabilité difficile pour de la vente en e-commerce directe, d’autant plus que ces produits sont habituellement achetés en grande surface généraliste au moment des courses de la semaine ou éventuellement en pharmacie pour certains produits nécessitant un conseil d’expert. Logique donc que les marques d’hygiène plébiscitent fortement la distribution indirecte en ligne.
Concernant les marques de beauté (cosmétique, dermocosmétique, parfumeur), le e-retail est très développé depuis plusieurs années et les clients ont pour habitude d’acheter leurs produits en grande distribution spécialisée. Par ailleurs, même si certains produits peuvent avoir un positionnement prix plus élevé que les produits d’hygiène, l’équation commerciale est toujours difficile à atteindre et la complexité de gestion et de mise en place de l’e-commerce direct rebute nombre de marques.
Pourtant la distribution indirecte en ligne n’est pas incompatible avec la mise en œuvre du e-commerce direct. Ces deux routes to market sont d’ailleurs généralement complémentaires.
A noter que les 10% en reste de cette distribution indirecte en ligne le sont par choix stratégique, préférant plus de flexibilité et de rapidité, optant pour un contact direct avec leurs consommateurs, et se distinguant de la concurrence par ce choix de distribution unique en propre.
Ce n’est donc pas étonnant que 44% d’entre elles soient des DNVB (Digital Native Vertical Brands) : des marques nées sur le digital, drivées par la data, opérant un commerce vertical sans intermédiaire, et se centrant sur la relation client.
L’e-commerce direct-to-customer encore peu developpe dans le secteur de l’hygiène-beauté
Seuls 52% des 281 marques benchmarkés possèdent un site e-commerce en propre.
La maturité e-commerce semble donc relativement faible, et cela quel que soit le sous-secteur même si le constat est plus marqué pour les marques d’hygiène (24%), contre 56% des marques de cosmétiques, 66% des marques de dermocosmétiques et 54% des marques de parfumeurs.
Nous avons déjà partagé dans notre article « e-commerce DTC (direct-to-customer) : Eldorado ou probable fiasco ? », les contraintes qui peuvent freiner une marque non-distributeur à s’engager sur la voie du e-commerce direct :
- Une équation économique complexe
- Des distributeurs « puissants » en ligne
- Des effets de cannibalisation possibles.
- Un fort risque lié à la désintermédiation, notamment le déréférencement des produits chez certains gros distributeurs, ou a minima, des négociations durcies avec les achats.
Mais au-delà de ces contraintes, proposer un canal de vente e-commerce avec une proposition de valeur différenciante peut s’avérer un atout important pour une marque (cf. notre article « e-commerce DTC (direct-to-consumer) : les enjeux d’apprentissage et de connaissance client »). Atout qui deviendra probablement incontournable, notamment avec la crise sanitaire que nous venons de vivre et qui devrait voir les habitudes de consommation des français évoluées de plus en plus vers le digital.
Des propositions de valeur pas si differenciantes
Sur les 144 marques qui possèdent un site e-commerce, notre étude montre qu’assez peu d’entre elles offrent un positionnement fortement différenciant par rapport au marché ou offrant une véritable valeur ajoutée au client.
- 37% d’entre elles optent pour un positionnement purement transactionnel et donc identique à ce que peut offrir un e-retailer.
- 62% se positionnent sur de l’expertise et du conseil en publiant des conseils de professionnels par le biais de tutoriels ou via des interviews d’experts ou encore via des conseils et astuces beauté.
Seules quelques marques affichent un positionnement e-commerce vraiment différent, souvent lié au positionnement de la marque elle-même, par exemple en adoptant une approche RSE comme Lamazuna qui s’est spécialisée dans le zéro déchet et notamment les produits solides pour en finir avec les flacons et emballages, ou une approche différenciée par questionnaire comme Sillages Paris qui a structuré son site par un questionnaire menant à une personnalisation produit.
Bien que les sondages clients montrent que la RSE devient une tendance de fond qui pourrait encore plus se développer après la crise, on note pourtant que seules 15% des marques affichent leurs labels RSE et 12% prennent des engagements RSE comme Lush qui met en vente un produit, le charity pot, pour lequel tous les bénéfices seront reversés à des associations locales
Côté offre produit, rien de vraiment nouveau par rapport aux e-retailers : coffrets et boxs produits, formats divers (voyage, miniature), proposition d’échantillon pour chaque commande, exclu web et éditions limités sont devenus la norme.
Au niveau du parcours de commande, même constat. Les services de paiement, de livraison ou de relation client sont alignés sur les standards e-commerce, voire sont quelque fois moins disant que ce que peuvent proposer les e-retailers (notamment au niveau de la livraison).
Ce n’est donc pas par l’offre produit, ni par les fonctionnalités d’achat que les marques se différencient des e-retailers mais par 3 autres leviers.
Levier 1 : Les services
Même si l’offre de service est encore peu développée, certaines marques offrent des services à forte valeur ajoutée pour le client, traduisant parfois de nouvelles attentes ou de nouveaux modes de consommation :
- 1 marque sur 4 met à disposition sur son site un service de diagnostic (de peau, de cheveux, de parfum, etc)
Ex : L’Oréal Paris met à disposition sur son site le Skin Genius : en un selfie et grâce à l’intelligence artificielle, un diagnostic de peau et une routine de soin personnalisée sont proposés
- 1 marque sur 5 ayant au moins un point de vente physique permet de réserver en ligne un rendez-vous
Ex : L’Artisan Parfumeur permet de réserver une consultation en atelier pour créer son parfum sur mesure
- 17% promettent une personnalisation simple (gravure, composition d’un kit, etc.) ou plus complexe (composition produit)
Ex : Function of Beauty promet un shampoing complètement personnalisé : principes actifs choisis sur mesure selon vos réponses à un questionnaire, couleur du produit, nom sur le flacon.
Plus minoritaire, quelques marques se distinguent en proposant :
- des éco-recharges de consommation responsable comme Garancia qui met en vente des éco-recharges de ses eaux micellaires permettant de remplir l’équivalent de 4 flacons
- de s’abonner à une box périodique, par exemple Oolution qui permet de choisir sa fréquence de livraison et de composer sa propre sélection de produits
- de tester un produit en réalité virtuelle, comme Make Up For Ever qui offre de tester sur son site un fond de teint en réalité virtuelle par caméra
Levier 2 : Le contenu
La publication de contenus-conseil est devenue un standard pour les marques de beauté et d’hygiène (52%) et permet de mettre en avant l’expertise des marques sous forme d’articles, de tutoriels et d’interviews. La publication des avis clients s’est également démocratisée (67% des sites le proposent)
Ex : Clarins conseille ses clients grâce à sa Beauty School regroupant tutoriels vidéo beauté et conseils d’expert
Ex : Le site de BareMinerals publie des interviews de consommatrices
Levier 3 : La fidélisation
28% des acteurs benchmarkés se différencient en proposant un programme de fidélité sur leur site e-commerce. Les caractéristiques de ces programmes (mécaniques de récompenses et avantages) sont globalement assez similaires aux programmes proposés par les e-retailers mais 50% d’entre eux offrent des expériences que seule la marque peut offrir (ce qui en soit est différenciant).
- Ex : Le programme L’Occitane+Moi de L’Occitane permet aux clients de potentiellement participer à un voyage en Provence, des soirées VIP en boutique, des tests en avant-première
- Ex : Le programme La Jolie Carte d’Yves Rocher propose aux clients une invitation à une journée de plantation d’arbres et/ou la possibilité de convertir ses points en faveur de la plantation de 3 arbres
Par ailleurs, l’omnicanalité des programmes commencent également à se développer avec près de 65% des programmes valables à la fois sur le site e-commerce et en réseau de distribution directe (pour les marques possédant des boutiques en propre)
On note également 33% des programmes sont valables en direct (site et/ou boutique) et en réseau de distribution indirecte ! Le traçage des achats se faisant par scan ticket dans plus de 90% des cas et/ou via un code barre unique in-pack pour 39% de ces programmes.
- Ex : Le programme Le Cercle Mugler permet aux clients de cumuler des points dès qu’ils effectuent un achat en ligne sur le site ou en magasins partenaires
- Ex : Le programme My Roger&Gallet permet aux clients de cumuler des points dès qu’ils effectuent un achat en ligne sur le site, en boutique Roger&Gallet ou en pharmacie, qu’ils peuvent ensuite échanger contre des cadeaux ou des produits
Les RÉSEAUX sociaux : nouveau canal de vente des marques hygiène-beauté ?
Les réseaux sociaux sont devenus l’un des canaux de marketing et de communication les plus populaires, permettant d’augmenter visibilité, notoriété, trafic et fidélisation par l’écoute et l’interaction avec de potentiels clients.
C’est donc sans surprise que 94% des 281 marques à l’étude ont une page Facebook officielle et 90% ont un compte Instagram officiel.
Toutefois, les marques envisagent également, et de plus en plus, les réseaux sociaux comme un canal de vente permettant de développer leur business et accroître leurs ventes.
Facebook offre aux e-commerçants une fonctionnalité permettant de mettre en vente leurs produits sur le réseau, par le biais d’un onglet « Boutique » intégré à la page Facebook. Cette « Boutique » se présente comme un catalogue produit et peut renvoyer vers le site e-commerce de la marque ou vers un partenaire e-retail.
Parmi les marques ayant une page Facebook, 45% possèdent cette fonctionnalité. 90% d’entre elles renvoient vers leur site e-commerce direct et 10% renvoient vers un site e-retail partenaire (Amazon, Sephora, Nocibé, Monoprix, etc.).
De façon similaire, Instagram propose d’activer la fonction « Shopping ». Parmi les marques ayant un compte Instagram, 68% utilisent « Shopping ». 94% d’entre elles reconduisent vers leur site e-commerce direct (français ou international) et 6% vers un e-retailers partenaires (Amazon, Sephora, etc.).
Il est probable que l’avenir du e-commerce passe par les réseaux sociaux pour les marques de beauté et d’hygiène car même si elles ne vendent pas encore toutes via ce canal, cela pourrait changer avec de nouvelles fonctionnalités qui voient le jour sur Facebook et Instagram permettant aux clients de finaliser leur vente directement sur le réseau social, sans être renvoyé vers le site e-commerce de la marque.
Pour aller plus loin…
Pour aller plus loin, grâce aux insights récoltés dans le cadre de notre étude, VERTONE a également réalisé un outil de scoring permettant d’évaluer la maturité e-commerce d’une marque d’hygiène-beauté.
En moyenne, le secteur hygiène-beauté semble encore assez peu mature comme le montre les schémas ci-dessous. L’offre de service liée aux produits, le diagnostic, la fidélisation et la RSE sont particulièrement peu développés par les marques. Le secteur des cosmétiques est légèrement plus mature que les autres alors qu’au contraire le secteur des parfumeurs se semble accumuler du retard :
Les équipes VERTONE se tiennent à votre disposition pour vous présenter notre étude à votre convenance, pour vous aider à positionner votre marque en termes de différenciation e-commerce sur votre marché et pour les marques ne possédant pas d’activité e-commerce, vous aider à étudier l’opportunité de lancer un site e-commerce en direct.
Un article rédigé par Pierre Brun et Manon Sabathier