06/10/22

Salon Produrable 2022 : quelles tendances pour la RSE ?

Du 13 au 14 septembre 2022, nous avons assisté à la 15ème édition du salon PRODURABLE, l’un des plus grands rendez-vous européens des acteurs et des solutions en faveur de l’économie durable. Suite à ces deux jours de salon riches en conférences, nous analysons dans cet article 6 tendances à garder en tête. 

Tendance N°1 : élargir notre vision des enjeux RSE au-delà du changement climatique : biodiversité, inclusion sociale…

La scène médiatique ainsi que les stratégies RSE des entreprises se focalisent aujourd’hui sur l’enjeu du changement climatique et la réduction de l’empreinte carbone. Bien qu’étant primordial, cet enjeu n’est néanmoins pas le seul à considérer.
 
La Théorie du Donut, développée par l’économiste britannique Kate RAWORTH, est de plus en plus relayée par les différents acteurs de l’économie durable pour synthétiser les enjeux RSE auxquels doivent faire face les entreprises : 

  • Des enjeux environnementaux : 9 limites planétaires à ne pas dépasser pour maintenir un écosystème sûr pour l’humanité et pour les générations futures 
  • Des enjeux sociaux : pour garantir un niveau de vie minimum à chaque être humain sur la planète 

Lors du salon PRODURABLE, plusieurs conférences ont mis en exergue l’enjeu de préservation de la biodiversité : un enjeu très difficile à mesurer car il n’existe pas encore d’indicateur unique comme l’empreinte carbone pour le changement climatique… et pourtant très important : les écosystèmes terrestres, aquatiques ou aériens sont indispensables à notre survie. Plus de 2/3 des espèces vertébrées ont disparu depuis 50 ans. Ces enjeux sont de plus en plus adressés par les entreprises, à l’instar de PANZANI qui finance la mise en place d’actions concrètes chez les agriculteurs de blé dur sur ces sujets.  
 
Côté SNCF, l’élargissement du réseau et la gestion des friches appartenant au groupe ont un impact important sur la biodiversité : les nouvelles lignes viennent naturellement perturber l’écosystème végétal et animal. C’est pourquoi la priorité du groupe SNCF depuis 2015 est de moderniser le réseau existant, ce qui représente un impact moindre pour l’environnement que l’extension. La SNCF s’est également engagée sur 10 projets de rétablissement des CECE (Continuité Écologique des Cours d’Eau) avant fin 2022. 
 
Des dispositifs officiels existent pour favoriser l’émergence et la valorisation d’engagements sur la biodiversité de la part des entreprises. Nous pouvons par exemple citer l’initiative «act4nature international » ou le programme « Entreprises engagées pour la nature ». Notons également que la prochaine COP pour la Biodiversité aura lieu fin 2022, sur le même principe que les COP pour le Climat. 
 
Les enjeux sociaux n’échappent pas non plus aux stratégies RSE. Au-delà de ses actions environnementales, le GROUPE M6 travaille avec l’association 2GAP pour améliorer la représentativité des femmes à l’antenne, en mettant notamment en avant des expertes féminines dans le décryptage des sujets d’actualité. Les plus petits acteurs ne sont pas en reste : le spécialiste de la cyclologistique OLVO cherche à améliorer les conditions de travail souvent précaires des livreurs à vélo. 

Tendance n°2 : Réinventer les business models pour mettre la rse au cœur de l’activité

La dernière décennie s’est focalisée sur une vision « less bad » de la RSE : réduction des impacts négatifs, optimisation des procédés… On voit désormais apparaître l’ère du « more good », prônée entre autres par le label B-Corp avec son slogan « Ne pas chercher à être la meilleure entreprise au monde, mais la meilleure pour le monde ». C’est le modèle économique lui-même qu’il faut remettre en question, en réinventant les propositions de valeur. 
 
Pour cela, l’entreprise doit être guidée par une mission qui dépasse son seul but lucratif. Il est nécessaire de « décadrer » la réflexion pour s’autoriser à envisager d’autres manières de fonctionner et d’autres propositions de valeur à inventer. 
 
Selon le mouvement international B-Corp, un business model à impact (« IBM ») se définit selon 5 caractéristiques : 

  • Spécifique : il cible un bénéficiaire spécifique et / ou un bénéfice spécifique  
  • Matériel : il présente des avantages significatifs pour les bénéficiaires  
  • Vérifiable : il doit être documenté et prouvé par des données fournies par l’entreprise  
  •  Durable : il doit être intégré durablement dans l’essence même de l’entreprise 
  •  Extraordinaire : il doit se démarquer de ce que font les entreprises traditionnelles 

Tendance n°3 : Placer le marketing au service de la transformation durable

Souffrant souvent d’une mauvaise image auprès du grand public, le marketing doit reprendre ses lettres de noblesse en intégrant la responsabilité au cœur de son action. 
 
Le marketing a le pouvoir d’orienter les comportements de consommation de millions d’individus. Il peut rendre désirable de nouveaux modes de vie, de nouveaux produits, de nouveaux services. Plutôt que de faire partie du problème, il peut faire partie de la solution. Il peut donner de la transparence aux consommateurs, les sensibiliser aux impacts de leurs actes de consommation, les inciter à faire des choix éclairés et à les poursuivre dans la durée. 
 
À nous de réinventer les pratiques marketing pour les mettre au service d’une société plus responsable. Le marketing a tout son rôle à jouer dans la transformation durable. 

Tendance N°4 : S’intéresser au facteur humain pour accompagner le changement de comportement des individus

La psychologie et les neurosciences sont à prendre en compte dans la transition sociale et environnementale. Selon les études, 80% des consommateurs se disent prêts à changer de comportement. Pourtant, dans les faits, les actes ne sont pas toujours au rendez-vous. La raison de cet écart ? Une très grande complexité dans le fonctionnement cérébral et neuronal humain : il ne suffit pas de vouloir changer pour réussir à le faire. 
 
Le « social marketing » ou le « nudge marketing » peuvent être des pistes intéressantes pour inciter au changement, dans une dimension plus collective, au-delà des pratiques marketing traditionnelles. C’est par exemple ce que fait l’entreprise OGIC, promoteur immobilier, qui utilise le nudge pour concevoir des bâtiments qui incitent leurs habitants à adopter des comportements responsables : par exemple, des douches qui changent de couleur pour limiter la consommation d’eau ou un système de jeu collectif au niveau de l’immeuble pour mener des actions responsables avec ses voisins.   De son côté, le service Darty Max du groupe FNAC DARTY lutte contre le préjugé des consommateurs selon lequel « la réparation d’un appareil est souvent plus coûteuse que l’achat d’un nouvel appareil ». Pour cela, FNAC DARTY propose un système d’abonnement mensuel qui permet de réparer ses appareils électroménagers de manière illimitée pour 9,90€ / mois. La mensualité permet de rester dans le top of mind du client, alors que le prix permet de déclencher le comportement de réparation : le client se disant « puisque j’ai payé le service, autant l’utiliser ». 

Le GIECO (Groupe International pour l’Évolution du Comportement) souhaite s’inscrire dans la lignée du GIEC pour adresser spécifiquement les problématiques liées aux comportements humains en vue d’un développement plus durable, équitable et désirable. Il regroupe les meilleurs spécialistes au monde avec pour objectif de proposer des mesures concrètes à destination de la société civile, pour faciliter le changement des comportements.

Tendance N°5 : Surfer sur la vague des parties prenantes qui sont prêtes au changement

Dans toutes les conférences, un même constat est ressorti : les parties prenantes, qu’elles soient internes ou externes, sont en forte attente de l’engagement des entreprises. 
 
La RSE est devenue une préoccupation prioritaire des collaborateurs. Les clients finaux sont sensibles à ces enjeux et valorisent les entreprises qui s’engagent positivement. Les partenaires (distributeurs, fournisseurs…) sont également attentifs à ces sujets. 
 
Plusieurs marques dans le secteur alimentaire ont notamment témoigné d’un bon accueil de la part des distributeurs. Par exemple, PERNOD RICARD a récemment annoncé l’arrêt progressif du suremballage de son whisky Aberlour. La direction a été hésitante à valider ce projet car le coffret entourant la bouteille est un marqueur fort du segment whisky. L’entreprise témoigne néanmoins d’un accueil positif de la part des grandes surfaces : le marché semble plus prêt au changement qu’on ne le croit. 

Tendance N°6 : Oser investir au-delà du profit court terme

Une question revient régulièrement lorsque l’on parle de RSE : comment concilier un engagement long terme avec l’exigence de profit à court terme ? Les entreprises du forum PRODURABLE qui nous ont paru les plus engagées sont pour la plupart des entreprises familiales, qui peuvent se permettre d’investir et de réfléchir sur le long terme sans pression d’actionnaires extérieurs. 
 
Charles KLOBOUKOFF, fondateur du Groupe LEA NATURE, est même allé plus loin en transmettant progressivement le contrôle du capital à un fonds de dotation d’intérêt général, le fonds F.I.C.U.S. (Fonds de soutien aux Initiatives Citoyennes Utopiques et Solidaires). Objectif : protéger l’indépendance et les valeurs de l’entreprise et montrer qu’un autre modèle de performance est possible, au service de l’humain et de la planète.  
C’est également le modèle choisi par Yvon CHOUINARD, fondateur de PATAGONIA, qui a annoncé récemment le transfert de 100% de ses parts à un fond chargé du respect des valeurs de l’entreprise. « La Terre est maintenant notre seul actionnaire » a-t-il déclaré. 
 
Sans aller aussi loin que la création d’un fonds de dotation, il nous semble que les entreprises qui se démarquent dans le domaine de la RSE sont celles qui osent miser sur le long terme, par exemple en investissant dans de nouvelles machines industrielles ou en testant des PoC ayant une rentabilité court-terme incertaine mais la perspective de nouveaux modèles pérennes. 

Retrouvez notre article sur les 5 BONNES PRATIQUES POUR TRANSFORMER L’ENTREPRISE À L’AUNE DU DÉVELOPPEMENT DURABLE en cliquant ici.

Un article rédigé par

Florence Hirondel, Manager

Fanny Moulin, Manager