04/03/20

Quelle proposition de valeur e-commerce pour les marques PGC et alimentaire ?

Alors que la distribution alimentaire online est en forte croissance en France, tirée principalement par le dynamisme du drive (Nielsen) et d’Amazon (LSA), l’e-commerce direct (ou e-shop) reste une activité peu développée par les marques agroalimentaires.

Pour autant, selon une étude réalisée par VERTONE, sur 60 groupes agroalimentaires présents en grande distribution et détenant près de 230 marques, 38% d’entre eux ont lancé un ou plusieurs e-shops.

Pourquoi l’e-commerce alimentaire est-il si peu développé ?

Pour les marques disposant d’un e-shop, cette activité représente une faible part de leur chiffre d’affaires pour plusieurs raisons.

Comme précisé dans notre article « e-commerce DTC (direct-to-customer) : Eldorado ou probable fiasco ? », plusieurs contraintes empêchent le développement du e-commerce direct pour une marque non-distributeur.

  1. Une équation économique complexe en raison des coûts inhérents au e-commerce direct (coûts logistiques et coûts de l’acquisition de trafic qui devient de plus en plus important avec la forte compétition en ligne).
  2. Des distributeurs « puissants » en ligne, notamment les enseignes de GSA (Carrefour, Intermarché, etc.) et les pure players du web comme Amazon, qui proposent une offre large et compétitive ainsi qu’une expérience client efficace.
  3. Un fort risque lié à la désintermédiation, notamment le déréférencement des produits chez certains gros distributeurs, ou a minima, des négociations durcies avec les achats.

Par ailleurs, d’après le Baromètre du e-commerce de la Févad, il existe 2 principaux freins des consommateurs à l’achat de produits alimentaires via le e-commerce :

  • La crainte liée à l’impossibilité de contrôler la fraîcheur et la qualité des produits alimentaires via la vue ou le toucher,
  • La crainte liée à la sécurité de paiement

En plus de ces freins, le consommateur peut percevoir peu d’intérêt à acheter sur un e-shop d’une marque alimentaire de grande consommation plutôt qu’en grande surface. Par exemple, si les produits vendus sont absolument identiques à ceux disponibles en magasin, et qu’il n’y a pas de services supplémentaires, le consommateur préférera probablement se rendre en grande surface ou sur un site de e-retail pour effectuer l’intégralité de ses courses, plutôt que sur un e-shop d’une seule marque, qui proposera moins de produits, probablement à des prix plus élevés qu’en distribution indirecte.

Pourquoi lancer un e-shop alimentaire ?

Malgré ces barrières, plusieurs raisons peuvent motiver une marque alimentaire à lancer son propre site e-commerce.

La principale consiste à limiter les risques de disruption du digital et anticiper les changements à venir. En effet, une marque peut perdre son pouvoir d’attractivité face aux e-retailers, ne plus comprendre les nouveaux critères de choix d’achat des consommateurs, ou bien encore ne plus être capable de proposer des produits ou des offres en adéquation avec les attentes de ses consommateurs. Le site e-commerce sera alors une source précieuse d’informations et permettra d’améliorer la connaissance client. En effet, grâce à leur boutique en ligne, les marques s’adressent directement aux consommateurs et peuvent collecter des données sur leurs clients, leur permettant de mieux les comprendre. Ainsi, certaines marques incitent par exemple les visiteurs de leur e-shop à créer un compte en leur offrant des bons de réduction en échange.

Certaines marques vont également vouloir saisir l’opportunité de proposer leur offre complète. Pour les marques faiblement présentes en GSA, comme la marque Funky Veggie distribuée uniquement dans une petite sélection d’enseignes (Monoprix, Franprix, Auchan, Carrefour city), l’e-commerce direct constitue un canal complémentaire, palliant une distribution limitée. De même, si une marque possède un assortiment de produits trop profond et large pour pouvoir être tous référencés en GMS, avoir son propre site e-commerce lui permettra de réunir tous ses produits en un unique lieu de vente. Par exemple, la marque de produits d’épicerie fine Albert Ménès possède plus de 30 catégories différentes de produits, et ne pourra jamais avoir tous ses produits référencés dans une même grande surface.

De l’importance de se différencier de la grande distribution et des e-retailers

Le succès d’une stratégie e-commerce passe par une proposition de valeur différenciante qui justifie qu’un client vienne sur le site de la marque plutôt que de se rendre en grande surface.

Les tendances de consommations actuelles permettent d’identifier a minima les sujets sur lesquels il est intéressant de se pencher pour construire cette proposition de valeur :

1. De l’exclusivité : offre produit, promotions, ventes privées…
Ex : Bonne Maman propose des parfums de confitures inédits sur son e-shop
Ex : Albert Ménès offre la possibilité de composer des coffrets cadeaux sur son site
Ex : La marque St Michel propose de commander des box composées d’un assortiment de produits pour découvrir différentes gammes de la marque, notamment des gammes exclusives en ligne.
Ex : Le groupe Bel propose des produits dérivés dans sa boutique La vache qui rit®

Coffret Albert Ménès

2. De nouveaux modes de consommation : consommation responsable, sous forme d’abonnement, de produits de seconde main, via du test and buy… 
Ex : Sur le site e-commerce de Charal, il est possible de s’abonner à une box trimestrielle composée d’une sélection de 5 pièces de viande
Ex : Nescafé Dolce Gusto proposent aux membres de sa communauté de recevoir des échantillons gratuits pour tester gratuitement les nouveautés

3. Des services à valeur ajoutée : réponse à un irritant client particulier, personnalisation, co-construction  
Ex : Avec evianchezvous, Evian livre les packs d’eau directement chez leurs clients sur le pas de porte et leur évite ainsi le transport de ces produits lourds.
Ex : La marque Gallia a mis à disposition un service de conseils d’experts joignables 24/7 par téléphone ou par chat en ligne, que les consommateurs peuvent contacter pour toute question relative à l’allaitement ou la nutrition
Ex : M&M’s propose des produits personnalisables pour des événements tels que les anniversaires

Le service evianchezvous

4. De la fidélisation : via des programmes de fidélité valables en ligne et/ou en omnicanal. Ex : Avec le club Gallia, les clients cumulent des points dès qu’ils effectuent un achat en ligne, en pharmacie ou en grandes surfaces, qu’ils peuvent ensuite échanger contre des cadeaux ou des remises en ligne

En conclusion

Il est essentiel pour les marques d’avoir une réelle proposition de valeur et de se différencier sur leur site e-commerce si ces dernières souhaitent inciter les consommateurs à le fréquenter.   En revanche, il n’existe pas de réponse unique. Chaque acteur doit réfléchir en profondeur à sa propre proposition de valeur en jouant l’axe de la différenciation, en adéquation avec son ADN, tout en s’assurant que la proposition réponde à une attente ou un besoin réel du consommateur.

Article rédigé par Pierre BRUN et Laura PAN