Transport : 5 tendances chez les voyageurs qui impactent « durablement » la mobilité
VERTONE revient sur 5 grandes tendances chez les usagers qui impactent fortement la mobilité d’aujourd’hui et de demain.
La mobilité a été fortement impactée par la crise sanitaire et le paysage en ressort durablement transformé, réinventé. De plus, le secteur du transport (et principalement du transport routier) est responsable de la part la plus importante des émissions de CO2 dans le monde. Le rapport des Français aux transports est en pleine mutation, comme le montre l’Observatoire de la mobilité : en 2020, plus de 30% des usagers disaient vouloir changer leurs habitudes au quotidien en termes de déplacements, en renonçant de manière durable aux transports en commun une fois la crise sanitaire passée.
Or, les alternatives durables aux modes individuels sont un vrai atout écologique pour réduire l’empreinte carbone de nos déplacements. Ces tendances sociétales représentent un défi pour tous les acteurs de la mobilité durable sur le territoire français.
1/ Une démobilité et une baisse durable de la fréquentation des transports en commun
Les confinements successifs ont amené les Français à adopter de nouvelles habitudes de déplacement et à les limiter dans la durée (cf. article) : livraisons à domicile, télétravail, besoin de flexibilité, faible anticipation… Ces évolutions d’usages ont entrainé une diminution de 30% la fréquentation des transports en commun, fréquentation qui ne reviendra probablement pas d’aussi tôt à ses niveaux d’avant Covid.
Ce phénomène de démobilité s’est accompagné d’un report modal important vers les moyens de transport individuels tels que le vélo ou la voiture, et d’un phénomène de délaissement des zones urbaines, puisque 23% des Français envisagent de quitter les villes dans les années à venir.
Un autre phénomène qui accompagne la digitalisation du travail (prérequis au télétravail) est la digitalisation des billets. Celui-ci était déjà bien engagé avant la crise sanitaire et cette dernière l’a accéléré. En effet, certains opérateurs ont repensé leur modèle de distribution (cf. article sur le modèle économique du m-ticketing). Cela permet de répondre aux besoins de flexibilité des usagers, et leur proposer des tarifications au plus près de leurs besoins, comme le payement à l’usage (Pay as you go).
2/ Une montée en puissance de la mobilité douce
Le développement de la pratique du vélo était une tendance de fond sur les 20 dernières années. Mais les grèves, et surtout la crise sanitaire ont fait de nouveaux adeptes, le vélo étant vu à la fois comme un véritable « geste barrière » et comme un mode de transport écologique. On observe un fort report modal vers le vélo en 2020, puisque les pistes cyclables ont enregistré une hausse jusqu’à +27% de fréquentation, et plus particulièrement à Paris, ou on note une hausse de + 47% entre 2019 et 2020, et encore +22% entre 2020 et 2021.
De plus, le vélo est un des modes doux les plus adaptés à l’intermodalité avec les transports communs. Celle-ci est facilitée par l’entrée en vigueur du décret du 19/01/2021, qui induit l’aménagement d’emplacements pour vélos dans les trains, ainsi que par le développement des racks à vélos sur les bus urbains.
En dehors de la sécurité sanitaire offerte par ce mode de transport, l’impact positif sur l’empreinte carbone, la rapidité et le coût sont autant de motivations pour les néo-cyclistes (cf. article sur le boom du vélo). Néanmoins, il existe des disparités d’usages en France (2% d’utilisateurs à Paris contre 15% à Strasbourg par exemple) mais également à l’échelle européenne, laissant à la France une forte marge de progression par rapport à ses voisins (en Allemagne, le vélo représente environ 10% de la part modale). Ainsi, de plus en plus de politiques et d’incitations (plan vélo, Loi Climat et Résilience etc.) permettent de se donner des objectifs forts afin de réaligner nos usages avec ceux des autres pays européens. Pour accompagner et accélérer le développement de la pratique du vélo, la ville de Paris a notamment adopté en novembre dernier un nouveau Plan Vélo 2021-2026. Il vise à rendre Paris 100% cycliste en développant la « culture vélo », grâce à des investissements à hauteur de 250 millions d’euros, soit 100 millions supplémentaires par rapport au premier plan qui est arrivé à échéance en 2020.
3/ Une concurrence toujours forte de la voiture
Bien que les mobilités douces connaissent un bel essor auprès de bon nombre de français, seulement 14% d’entre eux envisagent d’utiliser plus fréquemment le vélo ou la marche à pied pour se rendre au bureau.
En effet, plus de deux tiers des trajets domicile/travail sont réalisés en voiture, et ceci a été amplifié par la crise sanitaire (15% des français affirment se servir davantage de la voiture pour se déplacer).
L’utilisation forte des voitures individuelles s’explique notamment par l’absence d’alternatives en dehors des centres et de la périphérie : 55% des Français déclarent ne pas avoir le choix de leur moyen de déplacement au quotidien, parce que les transports en commun sont absents ou inadaptés aux besoins, comme dans de nombreuses zones blanches de mobilité sur le territoire français.
En réponse aux questionnements toujours plus importants sur l’utilisation des voitures individuelles et leur impact sur l’environnement, certains acteurs imaginent de nouveau business models autour du Vehicle as a Service (services location simplifiée) favorisant l’usage à la propriété. Par ailleurs, les constructeurs s’appuient aujourd’hui sur des innovations technologiques pour proposer des alternatives au moteur thermique et pour cela, deux technologies s’affrontent : les véhicules 100% électrique (cf. article sur les bornes de recharge) et ceux à pile à combustible fonctionnant avec de l’hydrogène (cf. article sur la place pour l’hydrogène dans la mobilité de demain).
4/ Une prise de conscience des enjeux environnementaux
Pour la première fois depuis le début des enquêtes Ipsos sur les préoccupations des Français, le climat est à la première place pour 42% d’entre eux, devant le pouvoir d’achat, le système de santé et l’emploi. Ces priorités se sont ressenties dans les urnes, par la vague « verte » lors des dernières élections européennes (où les écologistes sont passés de 52 à 70 sièges) ; puis lors des élections municipales en juin 2020 (cf. notre décryptage des enjeux de la mobilité durable au travers des programmes des candidats).
Ces préoccupations sont relayées par plusieurs règlementations et obligations pour le secteur de la mobilité durable : par exemple, les collectivités sont dans l’obligation de construire un plan climat qui met en avant tout l’ensemble des leviers mis en œuvre pour réduire les émissions de GES, notamment sur le champ du transport.
5/ Une PRISE DE CONSCIENCE DES ENJEUX DE Solidarité et d’accessibilité
En 2005, la loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, mettait en avant l’importance et la nécessité de garantir pour les personnes en situation de handicap l’accès aux services publics et aux transports en commun.
Les objectifs majeurs de ces politiques publiques ne sont pas encore totalement atteints en France : par exemple, les quotas de diversité en entreprise ne sont pas validés, et il en va de même concernant l’accessibilité des transports en communs. Ainsi, à Paris, seulement 3 % des stations de métro sont totalement accessibles aux personnes en situation de mobilité réduite.
Cependant, la réglementation évolue pour encourager l’utilisation des transports au commun par les PMR. Depuis 2017, la carte Mobilité Inclusion donne des avantages pour faciliter les déplacements des personnes âgées ou handicapées. De son côté, en 2021, la région Ile-de-France a développé de nouvelles offres tarifaires (gratuité, demi-tarif) aux accompagnants des personnes handicapées.
Par ailleurs, l’opinion publique s’informe et devient de plus en plus au fait des sujets d’inclusion des personnes à mobilité réduite ou mal-voyants. Les nombreux partages de témoignages et de commentaires indignés sur les réseaux sociaux démontrent la réactivité des usagers quant à l’inaccessibilité du métro parisien, ou bien plus largement des transports en commun et des lieux publics.
Ces cinq évolutions majeures dans le monde des transports, témoignent d’une transformation structurelle de la mobilité, vers des modes plus doux (avec la hausse de fréquentation des pistes cyclables notamment), plus inclusifs (grâce aux prises de conscience des enjeux pour les PMR notamment) et également plus accessibles à tous sur l’ensemble du territoire (en luttant contre les zones blanches de mobilité par exemple).
Les mutations des usages, la contraction du marché, et la concurrence accrue entre modes de transport remet en question les besoins des AOM, ainsi que le modèle et le dimensionnement des offres proposées par les transporteurs (cf. article sur les réponses à appel d’offre dans le transport).
Vous trouverez en complément de cet article, les 5 évolutions favorisées par les politiques publiques et les évolutions règlementaires récentes.
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